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La biotechnologie et les start-up – Partie 1 : Amgen

Je ne sais pas grand-chose des biotechnologies (mon expérience est dans les technologies de l’information). Bien qu’une start-up soit une start-up, j’ai toujours eu le sentiment que la biotechnologie est un monde différent. On lit souvent qu’il faut facilement dix ans pour développer un médicament, de sorte que les start-up en biotechnologie ne vendent aucun produit pendant plus longtemps encore (avec des revenus éventuels ne provenant que de collaborations R&D avec les grandes sociétés pharmaceutiques). On entend aussi parler d’introductions en bourse, bien avant qu’un quelconque produit soit sur le marché – quelque chose d’inhabituel dans le monde de l’informatique (sauf pendant la bulle Internet). Enfin, les besoins de financement en capital-risque semblent être beaucoup plus grands que dans les technologies de l’information.

J’ai déjà écrit des articles sur le sujet et vous pouvez les trouver sous le tag biotech, mais je prévois d’écrire bientôt trois nouveaux posts, liés à des lectures et des analyses récentes:
– Ce post traite de ma lecture de Science Lessons – What the Business of Biotech Taught Me About Management par Gordon Binder, ancien PDG d’Amgen et Philip Bashe.

Amgen-ScienceLessons

– Je vais ensuite donner une mise à jour de cap. tables avec plus de 350 entreprises (partie 2) et j’en profiterai pour me concentrer sur les entreprises de biotechnologie.
– Finalement, je devrais lire bientôt un autre livre, Genentech – les débuts de la Biotech par Sally Smith Hughes. Espérons qu’il sera aussi bon que celui sur Amgen. (voici le résultat de cette lecture, partie 3 – Genentech).

Le business de la biotech

Amgen est probablement la plus grande entreprise de biotechnologie aujourd’hui (avec une capitalisation boursière proche de 100 milliards de $ en 2015). « La société a fait ses débuts sur le Nasdaq le 17 juin 1983. Considérant qu’Amgen ne possédait pas de produits à l’époque, aller en bourse semblait prématuré pour certains observateurs. Et c’était vrai; une introduction en bourse n’était pas du tout dans l’agenda initial. Mais nos autres sources de capitaux s’étaient recroquevillées comme un feuillage pendant la saison sèche de Californie du Sud, laissant l’appel public comme notre seule option ». [Page 6]

L’arme secrète d’Amgen

« Dès le début, Amgen a été un aimant pour les surdoués, les hommes et les femmes innovantes. Comment une organisation attire-t-elle des employés exceptionnels? […] Certes, nous avons offert des salaires et des avantages attrayants ; et les options d’achat d’actions mises à disposition de chaque employé d’Amgen ont motivé sans aucun doute certaines personnes à rester alors qu’autrement, elles auraient cherché des occasions ailleurs. Comme de nombreuses études l’ont cependant montré, les salaires et avantages ne suffisent pas à fidéliser des employés à long terme. Il y a quelque chose de plus profond, quelque chose qui parle à l’âme même d’une entreprise. […] Parce que la culture d’une société se dégage de ses valeurs, nous avons interviewé des centaines de membres du personnel dans toutes les unités d’Amgen pour apprendre quelles sont les valeurs qu’ils croyaient constituer le noyau de cette culture. Aujourd’hui, il semble que chaque entreprise sous le soleil (ou sous un nuage) a un ensemble de valeurs. Certaines sont rédigées par le PDG, et d’autres sont concoctées par les relations publiques ou le département des ressources humaines. Parfois, elles sont écrites par des consultants qui ne travaillent même pas dans l’entreprise. Plus souvent encore, la déclaration ne reflète pas vraiment les valeurs des organisations; c’est soit une liste de ce que la société aspire à être ou un outil de relations publiques pour impressionner les clients, les fournisseurs, et les investisseurs. » [Page 9]

« Comme Amgen a grandi de façon exponentielle, nous avons constamment lutté avec le même dilemme auquel sont confrontées les entreprises les plus florissantes à un certain point: comment rester agiles lorsque vous n’êtes plus une petite start-up. Vous le faites par la décentralisation du pouvoir, bien sûr, mais aussi en établissant une culture entrepreneuriale qui embrasse le changement et encourage l’innovation. Pour cela, la direction doit donner du pouvoir à ses employés, puis les soutenir à 100 pour cent, parce les créateurs ne proposent pas d’idées librement si ils croient secrètement qu’ils seront destitués au premier flop de leur projet prometteur. Dans une industrie comme la biotechnologie, les échecs abondent. Si Amgen n’avait pas suivi son principe – « Les employés doivent avoir la liberté de faire des erreurs, » – nous n’aurions pas survécu. » [Page 14]

Les financements d’Amgen

Amgen a été créée le 8 avril 1980. Puis Bowes le cofondateur et 1er investisseur a « cajolé six venture-capitalistes à investir à peu près 81’000 $ chacun pour l’amorçage. » [Page 18] George Rathmann est devenu le PDG et seul employé de l’entreprise. Lorsque la société a eu besoin d’un vrai financement de série A, Rathmann était convaincu qu’il fallait beaucoup plus que le typique million du premier tour et chercha $15M. Aucun VC n’aurait accepté, alors il a convaincu d’abord des grandes entreprises. Abbott investit $5M (qui aurait une valeur de $700M en 1990). Tosco ajouta $3,5M. Et le fonds New Court (géré par Rothschild) suivra alors pour investir $3M. Le tour atteignit au total $19,4M le 23 janvier 1981. Puis l’introduction en bourse a apporté $42M en 1983, mais ce fut seulement un autre commencement car plus de financements publics suivraient: $35M en 1986 pour le «secondaire» et $120M pour un troisième financement l’année suivante.

Voici la table de capitalisation d’Amgen au moment de l’IPO:
Amgen-CapTable

Bien que les start-up biotech aient des horizons plus longs que les entreprises en IT, l’intensité extraordinaire des activités est très similaire. Binder montre des exemples tels que l’IPO d’Amgen (chapitre 2), la découverte de l’EPO (chapitre 4) et son approbation par la FDA (chapitre 5). Il y a cependant une différence majeure. En biotech, il est question de science et de recherche. « Il est juste de dire que dans de nombreuses entreprises, sinon la plupart, les équipes de ventes et marketing dominent dans l’élaboration des stratégies d’entreprise; les scientifiques ou les créatifs peuvent être derrière le volant, mais en fait les gens de la vente et de la commercialisation définissent la feuille de route, aboyant les directions depuis le siège du passager. Pas dans le domaine de la biotechnologie et certainement pas chez Amgen où même la localisation de l’entreprise a été choisie pour attirer des scientifiques du meilleur niveau. Notre siège social est situé plus ou moins à égale distance des trois centres de recherche principaux dans le sud de la Californie: l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), l’Université de Californie à Santa Barbara (UCSB), et l’Institut de technologie de Californie (Caltech), à Pasadena ». [Pages 57-58]

Les partenaires d’Amgen

« Le succès est la capacité de survivre à vos erreurs. » George Rathman

Le chapitre 6 (« des partenariats au paradis – et dans cet autre endroit ») est à lire absolument. Binder explique l’importance des bons et des mauvais partenaires et cela, à nouveau, est lié aux valeurs et à l’éthique. Binder affirme que les gestionnaires sont beaucoup plus prudents quand ils embauchent quelqu’un que quand ils signent un partenariat.

« Notre recherche d’un partenaire pour l’entreprise commença ici, aux USA. À notre grande surprise, pas une seule entreprise pharmaceutique américaine n’a montré le moindre intérêt. […] Abbott Laboratories, un des investisseurs initiaux d’Amgen, a eu l’occasion d’être impliqué dans le projet Epogen. Le CEO et président Bob Schoellhorn déclina l’offre. Il avait été influencé par le chimiste en chef d’Abbott, qui ne pensait apparemment pas beaucoup de bien des médicaments à base de protéines de grande taille. Comme nous allions le découvrir plus tard, le biais n’était pas unique à Abbott; en fait, il a dominé l’industrie pharmaceutique traditionnelle. Le représentant d’une autre entreprise nous a informés que ses patrons avaient refusé l’offre sur Epogen parce que le marché était trop petit; leur département d’étude de marché avait prédit des ventes qui ne seraient jamais supérieures à 50 millions de $ par an. (Pour mémoire, le médicament génère 10 milliards de $ de revenus annuels. Quelles études de marché!) » [Page 126]

Leur premier partenaire serait Kirin, la compagnie de bière japonaise avec laquelle la confiance, la transparence et une bureaucratie minimale ont contribué à la construction d’un grand partenariat. Cela n’a pas été le cas avec Johnson & Johnson. « A ce jour, le mépris pour l’ancien partenaire d’Amgen est si profond que de nombreux employés proclament fièrement que leurs maisons sont à « 100 pour cent sans J&J ». Considérant que Johnson & Johnson et ses nombreuses entreprises vendent plus d’un millier de produits, du Band-Aids au Tylenol, ceci a tout d’un exploit. » [Page 133]

Amgen a également des partenaires académiques: « Memorial Sloan-Kettering possédait un mélange d’environ deux cents protéines. Mais ils n’avaient pas la technologie pour les séparer. Amgen l’avait. [… Amgen] a découvert le gène humain qui produit le G-CSF, situé sur le chromosome 17. Une fois isolé, le gène a été cloné en utilisant le même procédé que pour l’EPO humaine. Sloan-Kettering Memorial avait déposé un brevet faible, ne sachant pas ce qu’ils avaient exactement. Par conséquent, dit mon avocat général, Amgen était légalement libre de gérer son projet, sans avoir à payer une redevance à MSKCC. Cela ne me semblait pas éthique; sans Sloan-Kettering, nous aurions trébuché de nombreuses fois pour trouver le filgrastim (nom générique de Neupogen). Nous avons donc négocié une licence avec une redevance modeste. » [Pages 143-44]

Enfin, du moins pour cet article, voici la courbe de croissance d’Amgen – revenus et profits. Quand une start-up de biotechnologie est un succès, les chiffres sont impressionnants …

Amgen-Sales-Profits

Quelques sorties récentes dans la biotech suisse montrent des caractéristiques intéressantes

Au cours des 12 derniers mois, trois start-up de la région de Zurich ont connu une sortie. Molecular Partners est devenue publique sur la bourse suisse (voir mon post du 21 novembre) et deux autres start-up ont été acquises, Covagen par Janssen (voir le communiqué e presse d’août 2014) et GlycoVaxyn par GSK (communiqué e presse de février 2015), à chaque fois pour environ CHF200M. J’aavais déjà écrit un billet intitulé le dilemme des fondateurs suisses en décembre 2013. Mais je n’avais pas à l’époque publié de tables de capitalisation individuelle. Ici, elles y sont.

EquityTable-Covagen
Table de capitalisation de Covagen – cliquez sur l’image pour agrandir

EquityTable-GlycoVaxyn
Table de capitalisation de GlycoVaxyn – cliquez sur l’image pour agrandir

Le tableau suivant compare quelques caractéristiques intéressantes telles que les niveaux d’investissements et de dilution:
SwissBiotechDataFeatures
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J’aurais pu ajouter la part des universités qui était dans la gamme de 5-8% à l’incorporation avant d’être atteindre des niveaux de 0.2 à 1.8% à la sortie. Un autre point intéressant est que l’introduction en bourse semble induire moins de dilution et plus de création de valeur que le M&A.

La préférence de liquidation est une autre caractéristique intéressante. Le cas GlycoVaxyn montre un mécanisme complexe. Malgré la complexité du mécanisme et parce que le prix d’acquisition était beaucoup plus élevé que le montant investi par les VCs, les résultats sont semblables à ce qu’aurait donné une répartition proportionnelle.

J’ai ajouté ces tableaux et quelques autres à ma synthèse régulière. La voici:

En Suisse romande, l’EPFL a connu quelques sorties dans les 2 dernières années : Jilion, Sensima, Aïmago, Composyt. Intéressant de noter que les valeurs de sortie étaient plus faibles et les VCs inexistants. Mais les VCs ont été actifs aussi dans les 5 dernières années. Espérons que certains jolis résultats vont se produire dans un avenir proche …

Célébrons une (trop rare) IPO suisse: Molecular Partners

J’aurais pu dire: célébrons une (trop rare) IPO européenne. Molecular Partners est une spin-off de l’université de Zurich fondée par le Professeur Andreas Plückthun, Christian Zahnd, Michael Stumpp, Patrik Forrer, Kaspar Binz et Martin Kawe en 2004. Elle a été financée par des investisseurs privés: un premier tour de CHF18.5M en 2007 et un second tour de CHF38M en 2009. Elle a aussi signé un grand nombre d’accords avec des sociétés pharmaceutiques, ce qui explique des revenus élevés pour une biotech. L’université de Zurich en est aussi actionnaire depuis un accord de licence signé en 2004, grâce auquel elle touche aussi des royalties.

Molecular-CapTable
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Il est intéressant je crois d’illustrer l’évolution de l’actionnariat en fonction des financements successifs, dont l’IPO qui a apporté une centaine de millions à Molecular.

Molecular-Dilution
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J’aime aussi mentionner l’âge des fondateurs. Le document d’entrée en bourse fournit des données et j’ai estimé les autres à partir du parcours académique (18 ans pour une entrée à l’université…) Une moyenne de 33 ans avec un écart de 20 ans entre les extrêmes. Je sais que l’argent reste un tabou; les Européens n’aiment pas afficher des fortunes, qui restent très théoriques, car on ne vend pas ses actions dans une biotech aussi facilement qu’en employé de Facebook… Pourtant il me semble important de célébrer le succès des fondateurs et de leurs investisseurs… Bravo à tous!

Molecular-Founders-Age

Les IPOs biotech, pas si différentes.

Je viens de lire Biotech IPOs Start to Show Some Modest Signs of Life sur le site Xconomy. C’est un article intéressant car il met l’accent sur la biotechnologie, un domaine que beaucoup de gens considèrent comme très différent des autres start-up high-tech comme l’Internet, les logiciels ou l’informatique en général. L’idée générale est que cela prend beaucoup plus de temps pour réussir dans la biotechnologie. Vous devriez lire l’article si la biotechnologie est d’intérêt pour vous et je ne vais pas le commenter plus si ce n’est que la bonne nouvelle est qu’il y a eu ces dernièrs temps pas mal d’IPOs, la moins bonne nouvelle étant que les capitalisations boursières ne sont pas énormes.

Je suis plus intéressé par la mise à jour de mes données start-up (j’ai maintenant 131 start-up; voir ma dernière analyse en mars 2012 avec 116 entreprises) et voir comment se comporte la biotechnologie. Voici la synthèse (si vous êtes intéressé, la liste détaillée est fournie à la fin).

Alors qu’est-ce que je vois comme étant spécifique à la biotechnologie ? Tout d’abord, il ne leur faut pas plus de temps pour aller en bourse (8 ans contre une moyenne de 7 ans). La différence n’est pas dans le temps nécessaire à la liquidité. Elles lèvent 98M $ en moyenne, mais cela ne semble aps non plus spécifique. Mais, et c’est là le mais, leurs ventes ne sont que de $11M au moment de l’IPO. Donc, il leur faut beaucoup plus de temps pour atteindre les revenus. Mais cela ne les empêche pas d’aller sur les marchés (ou même d’être acquise au moment où elles commencent à avoir de bons résultats dans les essais cliniques).

Un autre élément spécifique est concerne les fondateurs. La moyenne d’âge des fondateurs est de 41 ans (similaire à la technologie médicale et aux semi-conducteurs), alors qu’elle est de 35 en moyenne. Pourquoi cela? parce nombre de fondateurs sont des professeurs d’université établis, reconnus. Souvent, ils ne travaillent pas à plein temps dans la start-up, mais ont un rôle de scientifique en chef ou de conseiller. De ce fait la part des fondateurs dans la start-up est plus petite que la moyenne (8% contre 15%).

Je dois enfin ajouter que la part globale fondateurs/employés est beaucoup plus petite (25% contre 40%) et les raisons sont nombreuses:
– les fondateurs ont moins d’actions (je viens de le mentionner),
– les investisseurs ont une plus grande équité (50% contre 45%) pour la raison qui suit,
– les actions vendues à l’IPO sont plus élevées (25% contre 16%). Cela vient du fait (je crois) qu’un objectif de levée d’argent équivalent est plus dilutif pour une entreprise avec moins de revenus;
– je n’ai pas mentionné un autre élément statistique: elles ont moins d’employés. Le tableau détaillé ci-dessous donne environ 100 employés (et vous pouvez voir que beaucoup d’entre elles ont même moins de 50 ou 20 employés). Cela induit une plus petite quantité de stock-options… (En moyenne mes 130 entreprises ont 500 employés au moment de l’IPO).

Je pensais que ces données était d’un certain intérêt. S’il vous plaît, réagissez ou commentez!

Annexe: les données détaillées (notez qu’il me manque celles d’Amgen)


cliquer sur le tableau pour l’agrandir

Quelques start-up biotech: 3/3 – une brève synthèse

Après Genentech, Chiron et Genzyme, voici une brève synthèse de toutes ces données sur la biotech. Le tableau qui suit vous rappelle toutes les données et j’y ai ajouté Amgen. Elle est certes dure à lire mais vous pouvez l’agrandir. Vous y trouverez pour les start-up l’année de fondation, celle de l’entrée en bourse (IPO), les revenues et bénéfices/pertes au moment de l’IPO, et le statut actuel. Pour les fondateurs, j’ai indiqué leur âge à la création, puis leur activité avant et après leur aventure entrepreneuriale. J’y ai ajouté des liens web.

Qu’y a-t-il d’intéressant à en dire?

– En moyenne, il leur faut 3 ans pour aller en bourse. Le mythe selon lequel la biotech prend un temps fou pour le succès s’applique aux revenus, aux bénéfices, mais pas à la sortie pour les actionnaires.
– En effet, lors de l’IPO, les revenus sont très faibles et les start-up perdent toujours de l’argent. Comparez par exemple à Apple sur le premier tableau.
– En définitive, elles ressemblent aux start-up Internet des années 90, avec des entrées en bourse très rapides malgré des revenus très bas.
– Enfin, elles sont achetées par des acteurs européens. C’est en totale opposition au modèle IT où les acheteurs sont américains (voir par exemple la page 36 du pdf que j’ai publié ici il y a quelques mois).

Et les fondateurs?
– D’abord ils ne sont pas jeunes. Comparez cette fois à la page 27 du même document. Les fondateurs américains y ont en moyenne 27 ans et les Européens, 33 ans..
– les fondateurs sont souvent des universitaires. Ils ne quittent pas tous leur carrière académique, prennent parfois un sabbatique. Ceci est sans aucun doute lié au point qui précède.

Tout cela montre ma faible connaissance de la biotech en général, je ne pourrais pas entrer dans beaucoup plus de détails. Mais je trouve les différences entre Biotech et Technologie de l’Information assez intéressantes pour ne pas dire considérables.

Quelques start-up biotech: 2/3 – Genzyme

Genzyme est le deuxième sujet de ma série biotech. Même approche qu’avec Chiron. Genzyme a été fondée en 1981, est entrée en bourse en 1986, soit en moins de 5 ans. Elle avait deux fondateurs, Sheridan Snyder et Henry Blair. Il convient d’ajouter qu’une 3ème personne, Henri Termeer, fut déterminante dans le succès de Genzyme. Snyder avait 45 ans à la fondation; c’était un entrepreneur qui continua à créer des entreprises après Genzyme. Blair était chercheur à Tufts et il avait 37 ans. Lui aussi fut un entrepreneur à nouveau après l’aventure Genzyme.

Genzyme avait des revenus mais aucun bénéfice au moment de l’entrée en bourse. Oak était l’investisseur principal et aussi bien Advent que Rothschild possédaient à peu près 5 à 6% de la société. Chose intéressante à noter, de même que Genentech (avec Roche) et Chiron (avec Novartis), Genzyme a été récemment achetée par uen pharma européenne : Genzyme a été acquise par Sanofi-Aventis pour $20B.

A suivre: quelques caractéristiques des fondateurs et start-up de la biotech.

Quelques start-up biotech: 1/3 – Chiron

La biotech est un monde qui ne m’est pas familier. Je viens de l’IT et je n’ai jamais vraiment compris la biologie. Les start-up biotech sont aussi très différentes de leur consœurs de l’IT. Il est bien connu qu’il faut des années en biotech pour générer des revenus venant des produits (pas de la R&D), je ne parle même pas de profits (un peu finalement comme dans le monde du semi-conducteur). Cela n’empêche pas ces start-up d’aller très tôt en bourse (un peu comme les start-up de la bulle Internet à la fin des années 90). Au fond, elles ont des similarités autant avec le software qu’avec le hardware.

Dans une série de documents sur la biotech, j’ai trouvé cette citation sur Genentech, que je ne traduis pas: « Late in 1979, Tom Perkins pushed the idea of a public offering. Although the technology was young, and we were early on in the development of products, there was enough interest in the public to get a public offering done. This was a foreign concept at the time. While we had a couple million dollars in revenue–! think it was $3.5 million in revenues in 1979-there were no product revenues or profits generated from products. Whether or not you could take a company public that didn t have product revenue, didn t have commercialized products, and didn t have significant profits, was an unknown. In the mid to late seventies, if companies went public, they had revenues and earnings. You d have at least $10 million in revenues and at least a million dollars in profit, then maybe you could have one of the small high-tech underwriters take you public. »

De plus, les fondateurs sont rarement ces « geeks » visionnaires (Gates, Jobs, Brin/Page, Zuckerberg) mais plutôt des chercheurs ou des professeurs d’université. Ils ne quittent pas en général leur poste et deviennent « chief scientist » dans la start-up. (Cela se produit aussi dans le monde des spin-offs académiques dans le domaine du hardware, ceomme This also happens in the hardware academic spin-offs, with je l’ai mentionné dans un récent post sur Atheros).

Comme première illustration de tout ceci, voici quelques données sur Chiron. Mon prochain post sera sur Genzyme et terminerai par des considérations générales dans le troisième.

Chrion fut une des premières biotech. Fondée en août 1981, elle est entrée en bourse en mai 1983 (soit en 2.2 années!). Elle avait trois fondateurs Edward Penhoet, William Rutter et Pablo Valenzuela qui avaient respectivement 41, 54 et 40 ans à la création de la start-up. Pas des jeunes gens d’une vingtaine d’années! Ils étaient alors dans l’ordre professeur à Berkeley, professeur à UCSF et chercheur à UCSF.

Voici mon habituelle table de capitalisation avec les camemberts pour l’actionnariat. Chiron eut des revenus de $1.5M et $0.8M en 1983 et 1982, il n’y avait alors aucun profit mais une perte de $2.2M en 83 et de $0.8M en 1982…

Chiron fut rachetée en 2006 par Novartis et ce n’est pas la seule biotech à avoir été rachetée par un Européen, comme nous le verrons bientôt.

Prochain post: Genzyme.

Europe et Etats-Unis: la croissance en IT et biotech

Voici un exercice que j’aime faire lorsque je commence à parler d’entrepreneuriat high-tech. Donnez moi dix noms de grands succès, par exemple dix sociétés cotées en bourse et fondées il y a moins de 40 ans. Il est assez facile de trouver des sociétés américaines, plus difficiles de trouver des européennes. Voici donc deux tableaux, l’un pour l’IT (technologies de l’information), l’autre pour la biotech.

J’avais fait l’exercice en 2007 mais depuis Sun Microsystems et Business Objects ont disparu. J’ajoute ici les revenus et les bénéfices des sociétés en plus des capitalisations boursières et des emplois.

Ce qui est frappant, je crois, au delà des ordres de grandeurs, est la durée entre année de création et entrée en bourse. La biotech est légèrement différente, mais je ne suis pas sûr que cela soit fondamentalement différent… Ainsi, on notera que la durée création-IPO est bien plus similaire entre les deux continents que pour l’IT.

Bob Swanson et Herbert Boyer: Genentech

Voici ma deuxième contribution à Créateurs, la newsletter genevoise, qui m’a demandé d’écrire une série de courts articles sur des start-up célèbres et leurs fondateurs. Après Adobe et ses fondateurs, John Warnock et Charles Geschke, voici Bob Swanson, Herbert Boyer, fondateurs de Genentech.

Bob Swanson et Herbert Boyer: Genentech

Les biotechnologies semblent être un continent à part sur la planète start-up. Elles donnent parfois l’impression d’être réservées à des scientifiques de pointe que les investisseurs financeraient pour le potentiel de leurs idées. Et l’entrepreneur dans tout cela ?

L’histoire des débuts de Genentech est la plus belle illustration que l’entrepreneur visionnaire est aussi nécessaire dans les biotechnologies. Plus qu’une entreprise, c’est une industrie que Bob Swanson a créée.

La légende veut que Bob Swanson capital-risqueur de 29 ans ait rencontré Herbert Boyer, professeur à l’université de Californie à San Francisco (UCSF). L’argent du premier et les idées du second ont permis la création de Genentech en 1976, suivie d’une entrée en bourse en 1980. L’histoire mérite approfondissement : Bob Swanson n’est pas un vrai investisseur, c’est un entrepreneur. Il a été embauché par Kleiner et Perkins (KP) qui ont compris que la vraie valeur d’un fonds de capital-risque est dans la création de sociétés et pas seulement dans le soutien financier. Ils l’ont compris avec le succès de Tandem et de Jimmy Treybig qu’ils ont financés dès le premier jour, en 1974. (Voir aussi les posts sur le premier fonds de KP.) Bob Swanson est passionné par le potentiel de la biologie et de la génétique (il a une licence de chimie du MIT en plus d’un MBA). Après avoir aidé KP pour une de leurs sociétés, il quitte le fonds pour se consacrer à sa passion. Il rencontre professeur après professeur qui tous, lui font comprendre que tout cela est science de haut niveau, mais bien loin d’applications commerciales.

Herbert Boyer n’est pas un professeur typique. Il est avec Stanley Cohen, le co-inventeur d’un brevet, chose assez rare dans le monde académique des années septante. Ce brevet appelé plus tard « Cohen Boyer » décrit le principe des manipulations d’ADN si bien que toutes les nouvelles technologies dans ce secteur nécessitaient l’utilisation de ce brevet et donc le paiement de royalties à leurs propriétaires : les universités de Stanford et UCSF se sont ainsi partagés plus de $250M en licences de la technologie à de nombreux industriels. Sur les débuts de Genentech, l’histoire et la légende se mêlent. Swanson appelle Boyer qui lui dit être très occupé mais qu’il pourrait lui consacrer dix minutes le vendredi après-midi suivant. Swanson n’a qu’une obsession : les applications de la recherche. Boyer lui répond qu’il y a évidemment un potentiel mais qu’il faudra encore dix ans de recherche fondamentale. « Pourquoi, pourquoi, pourquoi ? » ne cesse de demander Swanson, au point que Boyer en arrive à penser : « Pourquoi pas? Peut-être peut-on aller plus vite ». Les dix minutes deviennent trois heures.

Genentech est née, du moins dans les deux têtes bien arrosées de bière. Il faut alors  convaincre les sceptiques, les investisseurs n’étant pas les moindres.  Une semaine plus tard Tom Perkins rencontre les deux hommes et se souvient : « le risque technique était énorme. J’étais très sceptique. Je ne connaissais rien à la biologie. » Très impressionné par l’énergie de Swanson et la compétence de Boyer, il se décide à avancer petit à petit, pour diminuer les risques à chaque nouvelle étape et en minimisant l’investissement. Kleiner investit $100’000 qui durent neuf mois.

La suite  fait partie de l’Histoire. Genentech clone l’insuline en 1978 et l’hormone de croissance en 1979. Genentech aura levé $10M auprès d’investisseurs privés avant une entrée en bourse au Nasdaq en octobre 1980. Une première : une société de biotechnologies séduit les marchés alors que son premier produit ne sera approuvé qu’en 1985. En 1990, Roche et Genentech signent un accord stratégique qui fait de Roche l’actionaire majoritaire de la start-up. L’histoire se conclut en 2009 lorsque Roche acquiert l’intégralité des actions de Genentech.

Swanson n’était pas un investisseur, mais un entrepreneur visionnaire. Boyer n’était pas un universitaire dans sa tour d’ivoire. Ils ont eu aussi la chance d’avoir le meilleur des mentors, Tom Perkins. De l’énergie, des idées, un peu d’argent. C’est à une conversation presqu’accidentelle que l’ont doit l’émergence d’une industrie qui vaut des dizaines de milliards de dollars.

Cerise sur le gateau, la table de capitalisation de Genentech à l’IPO:

Pour en savoir plus:

Internet Archive:
http://www.archive.org/search.php?query=genentech

Le site web de Genentech:
http://www.gene.com

Prochain article: Des femmes entrepreneurs, Carol Batz et Sandy Kurtzig

Biotech UK et US

Une autre illustration des différences entre Etats-Unis et Europe : la croissance des biotech US et UK. Le texte intégral se trouve sur Nature Biotechnology et mon ami André m’a mentionné le blog Corante où il a découvert l’information.

corante.gif

Et voici la conclusion du blogger (en Anglais) :

« What I found interesting about the editorial, though, wasn’t these conclusions per se – after all, as the piece goes on to say, they aren’t really a surprise […] No, the surprise was the recommendation at the end: while the government agency that ran this study is suggesting tax changes, entrepreneur training, various investment initiatives, and so on, the Nature Biotechnology writers ask whether it might not be simpler just to send promising UK ideas to America. 

Do the science in Great Britain, they say, and spin off your discovery in the US, where they know how to fund these things. You’ll benefit patients faster, for sure. They’re probably right about that, although it’s not something that the UK government is going to endorse. (After all, that means that the resulting jobs will be created in the US, too). But that illustrates something I’ve said here before, about how far ahead the VC and start-up infrastructure is here in America. There’s no other place in the world that does a better job of funding wild ideas and giving them a chance to succeed in the market. »