Archives mensuelles : septembre 2013

Criteo prépare son entrée en bourse

La success story française, Criteo, vient d’annoncer son intention d’entrer en bourse au Nasdaq. Tous les détails sur le document F-1 de la SEC. J’avais essayé de construire la table de capitalisation de Criteo, un de mes exercices favoris, dans Que vaut Criteo?

Criteo-Founders

Je n’étais pas trop loin de la réalité. Les chiffres sont différents essentiellement parce qu’il y a eu un « stock split » de 2-pour-5 et d’autres choses qui me semblent assez mineures. Vous pouvez revoir cette table à la fin (tableau 3), mais d’abord voici les chiffres impressionnants de Criteo (profit & loss – tableau 1) ainsi que la structure actionnariale (tableau 2):

Criteo-P&L
Tableau 1 – Criteo P&L – cliquer sur l’image pour l’agrandir

Criteo-Owners
Tableau 2 – Les actionnaire principaux de Criteo – cliquer sur l’image pour l’agrandir

Criteo-CapTable
Tableau 3- La « vieille » table de capitalisation de Criteo – cliquer sur l’image pour l’agrandir

Les start-ups doivent-elles être davantage soutenues par l’Etat?

Tel était le sujet du débat de l’émission En Ligne Directe de la RTS auquel j’ai participé ce matin.

RTS-ENLD

Christophe Darbellay, conseiller national valaisan et président du PDC suisse avait déposé en 2009 un texte pour alléger la fiscalité des start-up. le conseil fédéral a dit non sous la forme du document: Rapport du Conseil fédéral «Diminution des recettes fiscales en cas d’exonération des jeunes entreprises développant des innovations» en réponse au postulat 09.3935 du Conseiller national Darbellay déposé le 25 septembre 2009 (document pdf).

Le document sonore devrait être disponible pendant un certain temps. Je crois que nous avons essayé de dire que le sujet est important mais mal compris. Les start-up ont besoin de talent et d’argent, mais aussi d’un environnement qui les encourage et qui soit ambitieux. Je me suis permis de citer à nouveau Neil Rimer qui avait réagi ici sur un sujet connexe: « Je continue à être sidéré par le propos qu’il n’y a pas suffisamment d’aide en Suisse pour les projets ambitieux. Nous, et d’autres investisseurs européens sommes perpétuellement à la recherche de projets d’envergure mondiale émanant de la Suisse. A mon avis, il y a trop de projets manquant d’ambition soutenus artificiellement par des organes— qui eux aussi manquent d’ambition— qui donne l’impression qu’il y a suffisamment d’activité entrepreneuriale en Suisse. » (A relire dans L’innovation en Suisse: tout changer ou continuer?)

Startup Kids, un film à voir par tous (et pas seulement les entrepreneurs)

Les films et la video sont peut-être en train de remplacer les livres et les blogs, en particulier pour communiquer sur les start-up et l’entrepreneuriat… C’est ce que m’avait dit Neil Rimer quand j’avais publié mon livre. Il est vrai qu’il y a eu récemment quelques films de fiction (Le réseau social, Jobs) et des documentaires (SomethingVentured) sans oublier quelques documents plus anciens comme Le triomphe des nerds.

Startup Kids fait sans aucun doute partie de cette tendance, et c’est un document intéressant (et divertissant). Vous pouvez voir la bande annonce ci-dessous et ensuite j’en cite quelques extraits. Ce travail m’avait été mentionné par quelques collègues (merci Corine :-)), y compris le très bon article du blog de Sébastien Flury, The Startup Kids – a film that any wannabe founder should watch!

Sur l’entrepreneuriat

StartupKids-Houston
Drew Houston, Dropbox: « C’est un peu comme sauter d’une falaise et devoir fabriquer votre propre parachute. »

StartupKids-Segerstrale
Kristian Segerstrale, Playfish: « Un entrepreneur, c’est quelqu’un qui ose avoir un rêve que peu de gens ont et, surtout, qui n’hésite pas à y investir son argent, sa parole, son temps, sa carrière et qui a l’audace de foncer pour concrétiser sa vision. »

StartupKids-Ljung
Alexandre Ljung, SoundCLoud (Suédois basé à Berlin et San Francisco): Je n’avais pas le profil type de l’entrepreneur, […] mais avec le recul, j’ai toujours eu beaucoup de projets passionnés, donc j’avais beaucoup d’esprit d’entreprise, mais pas dans le sens « business » du terme. »

Dans European Founders at Work, son co-fondateur, Eric Wahlforss indique : « Je pense que nous aurions pu facilement faire tout cela un an plus vite si nous avions pu être un peu plus audacieux et penser un peu plus en termes d’échelle dès le début. Nous avons commencé tout petit, avec presque pas d’argent, et une très petite équipe. Je pense que nous aurions pu être plus audacieux. […] Et fonctionnant avec une vision plus large dès le début. » Et puis, « Allez-y. » C’est la meilleure décision que j’ai jamais prise dans ma vie. […] Je faisais des études d’ingénierie et ainsi, j’ai eu une centaine de camarades de classe. Et je sais que presque aucun d’entre eux n’a fondé une entreprise, ce qui est fou parce que je sais que beaucoup d’entre eux avaient de bonnes idées. Mais aucun d’entre eux n’a tout à fait senti qu’ils étaient en mesure de se lancer vraiment.

La chance est un sujet important du film

Segerstrale à nouveau: «Pour réussir, une start-up a besoin de beaucoup de choses : une bonne idée, une super équipe, arriver au bon moment, avoir les investissements voulus, et elle a besoin de beaucoup de chance.»

StartupKids-Draper
Tim Draper, fondateur et investisseur, DFJ: « Le facteur chance a été très important pour les start-up qui ont connu le succès. Vous avez besoin de beaucoup de chance. 25 moteurs de recherche moteurs de recherche ont été financés avant que Google ne soit financé. Il y eut Friendster et LinkedIn et MySpace et environ 50 autres sociétés ont précédé FaceBook avant qu’il ne s’impose comme le grand gagnant sur son marché. » [Et c’était la même chose avec les sociétés d’ordinateurs dans les années 80!]

StartupKids-Klein
Enfin ne manquez pas Zach Klein (fondateur de Vimeo) dans son magnifique chalet en bois qui me rappelle le Walden de Thoreau.

Stanford va investir dans les sociétés créées par ses étudiants

« La prestigieuse université américaine Stanford va désormais investir dans des start-up. » C’est ainsi que commence un article du journal Le Monde. L’auteur, Jérôme Marin, est plutôt négatif quant à cette décision, telle la citation suivante: « La confusion des genres est alimentée même au sommet de l’université : son président entretient des liens étroits avec plusieurs géants de la Silicon Valley, notamment Google dont il est membre du conseil d’administration. » Sans chercher à polémiquer, il me semble que le journaliste se trompe.

Stanford va investir

Mais avant de vous donner mon point de vue, j’aimerais mentionner que j’ai cherché d’autres articles sur le sujet, j’en ai trouvé au moins deux:
– celui de TechCrunch, proche de celui du Monde, Stanford University Is Going To Invest In Student Startups Like A VC Firm. L’article est également critique mais mieux informé… il parle aussi des tensions entre mondes académiques et des affaires. « That tension between academia and industry was highlighted this past spring when a number of students dropped out of school to start Clinkle » avec des références à un autre article du New Yorker.
– le communiqué de l’université de Stanford, StartX, Stanford University and Stanford Hospital & Clinics announce $3.6M grant and venture fund. Si on lit le communiqué attentivement, il est question d’un don de Stanford à StartX et d’un fond conjoint Stanford-StartX. StartX est un accélérateur créé par les étudiants et je comprends que l’université soutient donc cette initiative. Il n’est pas question ici toutefois d’un fond géré par Stanford comme par un VC.

La raison pour laquelle je pense que le journaliste se trompe c’est quand il dit que « Stanford va investir dans les sociétés créées par ses étudiants ». Comme si cela était nouveau. Même si on admettait que la prise de participation dans des start-up en échange de licences de propriété intellectuelle n’est pas un investissement en soi, Stanford a tout de même pris des participations dans plus de 170 de ses start-up dans le passé.

De plus « l’endowment » de Stanford a investi au cas par cas dans de nombreuses start-up dans le passé (ainsi que dans des fonds de capital-risque). Par exemple, j’ai trouvé dans une base de données que je construis sur les entreprises liées à Stanford, que Stanford a investi dans Aion (1984), Convergent (1980), Gemfire (1995), Metreo (2000), Tensilica (1998). le site LinkSv mentionne Stanford dans 143 entreprises. [Je suis conscient qu’il y a une confusion entre investisseur et actionnaire, de sorte que le sujet reste quelque peu confus].

Enfin, dans les années 2000, le bureau de transfert de technologie de Stanford, OTL gérait deux fonds, le Birdseed Fund (pour des montants de $5k à $25k) et le Gap Fund ($25k to $250k) comme l’indique le rapport annuel d’OTL de 2002.

Il n’est donc pas du tout nouveau que Stanford investisse dans les start-up de ces étudiants ou chercheurs. Il y a toujours eu des tensions, il ne faut pas le nier non plus. Un exemple assez peu connu traite des débuts de Cisco, spin-off de Stanford. Rien donc de nouveau sous le soleil. Mais je vais ajouter sans surprise que le résultat global me semble extrêmement positif pour tous les acteurs, l’université (y compris dans sa dimension académique), les individus, les start-up et l’économie plus globalement.