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Qui a encore le courage dans la tech de s’opposer publiquement à Trump dans la Silicon Valley ?

Depuis quelques semaines ou mois, on découvre avec stupeur ou embarras qu’ils sont nombreux dans la Silicon Valley à avoir apparemment retourné leur veste pour soutenir la politique de Trump aux Etats Unis. C’est assez impressionnant même si cela ne l’est pas autant qu’on croit. J’ai déjà abordé le sujet en juillet 2024, à une époque où je croyais que Kamala Harris serait élue présidente. Cela s’intitulait La gauche et la tech dans la Silicon Valley. Et j’ai en effet découvert que d’anciens « sympathisants » des Démocrates se tournaient vers les Républicains tels Mark Zuckerberg, Sam Altman ou Marc Andreessen. Pire il semble que même Sundar Pichai (CEO de Google) ou Tim Cook (CEO d’Apple) allaient dans le même sens. Après tout en Europe, on n’est jamais choqué qu’un patron soit de droite et les moins favorisés de gauche. A nouveau vous pouvez relire mon post sur le sujet. En réalité, la Silicon Valley est tellement démocrate dans ses votes, qu’il était peut-être difficile de s’afficher autrement et aujourd’hui, les personnes s’affichent plus aisément. Les votes évoluent aussi comme illustré ici.

Alors je me suis posé la question de qui s’opposait aujourd’hui à Trump dans la tech et la Silicon Valley ?

J’ai été agréablement surpris de découvrir qu’il y avait des figures comme Bill Gates et Michael Moritz :

Bill Gates est un modéré et peu actif politiquement. Et je le cite/traduis à partir de Bill Gates says he’s surprised about his fellow billionaires’ rightward political shift: ‘I always thought of Silicon Valley as being left of center’ « J’ai toujours pensé que la Silicon Valley était de gauche ». « Le fait qu’il existe désormais un groupe important de droite me surprend. » Alors que « des choses incroyables se sont produites grâce au partage d’informations sur Internet », les réseaux sociaux ont connu des revers majeurs. « Vous voyez des maux que, je dois dire, je n’avais pas prévus. » Bien que Gates ne soit en aucun cas un partisan déclaré de Trump, il a déclaré qu’il ferait de son mieux pour travailler avec le président. « Je collaborerai avec cette administration comme je l’ai fait avec la première administration Trump, du mieux que je peux », a déclaré Gates au NYT. Voir aussi Bill Gates tente de se distinguer des autres milliardaires de la tech

Michael Moritz est moins connu mais si l’on sait qu’il a financé Google, Yahoo!, PayPal, Apple, Cisco, YouTube, ont peut apprécier ce qu’il a à dire dans Trump’s tech backers are ‘making a big mistake,’ En voici la traduction de la fin : Les financiers et les partisans de Trump dans le secteur technologique « commettent la même erreur que tous les puissants qui soutiennent les régimes autoritaires ». Il écrit que les riches financiers croient « pouvoir contrôler Trump », ou commettent « une autre erreur capitale : se leurrer en pensant qu’il ne tiendra pas ses promesses ». « Cela n’a pas été le modus operandi des régimes autoritaires au fil des siècles. »

Paul Graham que je respecte a écrit un article sur le wokeness qui mérite une lecture attentive mais ce n’est pas vraiment une opposition à Trump, il cherche plutôt à expliquer un mouvement. Je vous invite à lire « Les origines du wokeness ». Par exemple, je ne prétends pas que la deuxième victoire de Trump en 2024 était un référendum sur le wokeness ; je pense qu’il a gagné, comme le font toujours les candidats à la présidentielle, parce qu’il était plus charismatique ; mais le dégoût des électeurs pour le wokeness a dû y contribuer. Et « Trump et le wokeness sont cousins ».

Steve Blank est plutôt silencieux en matière de politique mais j’ai découvert qu’en 2020, a démissionné d’un conseil consultatif du ministère de la Défense, protestant contre la décision de l’administration Trump d’évincer la plupart de ses collègues membres du conseil et de remplacer certains d’entre eux par des loyalistes politiques sans expérience en matière de défense ou d’affaires. Voir ici. Toutefois, en décembre 2024, il parle d’opportunités offertes par trump dans Comment inverser la tendance, vaincre la Chine et la Russie et réparer le ministère de la Défense défaillant. Il n’avait pas (encore) lu Michael Moritz.

Qui d’autres ? J’ai un peu cherché en vain. Mes « héros » sont plutôt silencieux mais ils l’ont toutjours été alors qu’en conclure. Espérer que certains se réveilleront et oseront s’opposer quel qu’en soit le coût…

PS: j’ai trouvé un peu plus par exemple Larry Page : J’ai l’intention de dire au président que nous sommes avec lui et que nous l’aiderons de toutes les manières possibles. Si vous pouvez réformer le code fiscal, réduire la réglementation te négocier de meilleurs accords commerciaux, l’industrie technologique américaine sera plus forte et plus compétitive que jamais aurait-il dit selon Andoidsis.

Roger McNamme est un autre investisseur : Eh bien, tout ce qui concerne Trump semble être un retour sur investissement, n’est-ce pas ? Tous ces cadres donnent un million de dollars chacun. Ce sont des écarts d’arrondi. C’est de l’argent qu’ils trouvent entre les coussins du canapé de leur salon. Mais, vous savez, il s’agit essentiellement d’un paiement de précaution. Et dans le cas de Musk, l’investissement qu’il a fait dans Trump, qui était d’un quart de milliard de dollars, ou l’investissement qu’il a fait dans Twitter, qui était d’environ 44 milliards de dollars, ont été rentabilisés, évidemment, de très, très nombreuses fois. Je pense que Trump et Musk finiront par se séparer. Je ne connais pas du tout Trump, mais il n’a pas l’air d’être le genre d’homme à supporter quelqu’un qui fait de la compétition au même niveau que Musk. Mais nous verrons bien ce qu’il en est. Voir ici.

Et bien sûr, j’oubliais, oui !, il y a Reid Hoffman, le fondateur de Linkedin, « un des patrons de la Tech le plus farouchement opposé à Donald Trump et Elon Musk ». Voir ici ou ou encore .

PS2 : 15 avril 2025. Le jour où l’Université Harvard rejette les demandes de Donald Trump, je viens de lire quelques pages merveilleuses de La Montagne magique de Thomas Mann. Les voici :

« Bon sang, quel vieux crétin ! Ingénieur, qu’est-ce que vous lui trouvez ? Peut-il vous apporter quelque soutien ? les bras m’en tombent ! » […]
« Absolument, fi-il, parfait ! C’est, admettons-le… permettez-moi de … bon ! »
Et il essaya aussi de singer les geste doctes de Peeperkorn. « Ou oui, continua-t-il en riant, vous trouvez ça idiot, monsieur Settembrini , ou en tout cas difficile à cerner, ce qui, à vos yeux, est ans doute pire que de l’idiotie. Ah, la bêtise… Il y a toutes sortes de bêtises, et l’intelligence n’est pas la meilleure d’entre elles… Oh, là, je viens de commettre un bon mot, dirait-on. Comment le jugez-vous ? » […]
– Non en faisant ce bon mot, je ne suis pas su tout à l’affût de paradoxes. Je prétends simplement signaler les grandes difficultés que pose la définition de la bêtise et de l’intelligence. Et elle en pose n’est-ce pas ? On a bien du mal à les distinguer, les deux se confondent tellement… Vous détestez le guazzabuglio [fatras] mystique, je le sais bien, vous êtes pour la valeur, le jugement, et le jugement de valeur, ce en quoi je vous donne parfaitement raison. Mais la question de la bêtise, de l’intelligence, c’est parfois un mystère complet, et les mystères, il doit tout de même être permis de s’en occuper, à condition de s’efforcer en toute honnêteté d’aller au fond des choses. Je vais vous poser une question / cet homme nous met tous dans sa poche, allez-vous le nier ? Je le dis sans prendre de gants et, à ce que je vois, vous ne le niez pas. Il nous met dans sa poche et, en vertu de ne je sais quoi, il a le droit de se moquer de nous. D’où ça vient-il ? Comment, et dans quelle mesure, le fait-il ? Ce n’est bien sûr pas grâce à son intelligence : il serait hors de propos d’employer ce terme, je l’admets. C’est plutôt un être sentimental et obscur, et le sentiment, c’est carrément son dada – passez-moi cette expression familière. Je disais donc qu’il nous met dans sa poche, ce n’est ni grâce à son intelligence ni pour des raisons morales, vous ne l’admettriez jamais, et c’est vraiment hors de question. Ce n’est pas non plus pour des raisons physiques ! Ce n’est tout de même pas dû à ses épaules de capitaine, à la violence pure, ni au fait qu’il pourrait nous envoyer tous au tapis d’un coup de poing, bien qu’il ne songe pas un seul instant à le faire ; si ça lui passait par la tête, quelques mots civilisés suffiraient à l’apaiser… Donc ce n’est pas pour des raisons physiques, même si le physique entre sûrement en ligne de compte, pas au sens de la brutalité, mais dans un autre sens, celui du mysticisme : dès que le corps joue un rôle, l’affaire devient mystique, et le physique devient spirituel, ou l’inverse, on n’arrive plus à les distinguer, pas plus que la bêtise et l’intelligence. L’effet est pourtant là, ce dynamisme, et nous voilà à sa botte.
C’est un mystère qui se joue au-delà de la bêtise et de l’intelligence, et l’on ferait bien de s’en soucier, d’abord pour le tirer u clair, dans la mesure du possible, et ensuite pour notre gouverne. Et si vous êtes pour les valeurs, j’aurais tendance à dire au le personnalité est une valeur positive, en fin de compte., une valeur positive au-delà de toute expression, absolument positive, comme la vie, bref, une valeur de la vie, et tout à fait susceptible qu’on s’y intéresse de très près. Voilà ce que je pourrais répondre à ce que vous avez dit de la bêtise. » […]
– En faisant de la personnalité un mystère, vous courez le risque se sombrer dans l’idolâtrie. Vous adorez un masque. Vous voyez de la mystique là où il n’y a que de la mystification, une de ces formes trompeuses et creuses par lesquelles le démon e la physionomie corporelle se plaît parfois à nous berner. Vous n’avez jamais fréquenté le milieu du théâtre ? vous ne connaissez pas ces têtes de mimes aux traits rappelant à l fois Jules César, Goethe et Beethoven ? leurs heureux détenteurs, dès qu’il ouvrent la bouche, se révèlent être les plus lamentables crétins de la terre !
– Bon c’est une bizarrerie de la nature, mais j’y vois plus qu’une duperie : puisqu’ils sont acteurs, ces gens-là doivent avoir du talent, et le talent dépasse la bêtise et l’intelligence, c’est en soi une valeur de la vie. Vous aurez beau dire, Mynheer Peeperkorn a du talent, lui aussi, et voilà comment il nous met dans sa poche. Mettez […] au bout d’une pièce et faite lui prononcer une conférence du plus haut intérêt […]. A l’autre bout de la pièce Peeperkorn se contentera de dire en faisant une drôle de moue et en haussant les rides de son front : « Tout à fait, permettez – c’est réglé ! » Vous verrez, les gens se masseront autour de lui ; […] restera tout seul avec son intelligence, même s’il s’exprime avec une clarté pénétrante.
– Vous devriez avoir honte d’adorer le succès ! lui signifia M. Settembrini. Mundus vult decipi [Le monde veut être trompé]. Méprisez dont le verbe distinct, précis et logique, d’une cohérence toute humaniste ! Méprisez-le au profit de je ne sais quelle mascarade faite d’allusions et de sentimentalisme de charlatan, et vous ne tarderez pas à être le jouet du diable.

Deux belles histoires de startups récentes (pas dans la Silicon Valley, mais toutes deux acquises par Google) – partie 2 : wiz.io

En lisant quelques articles sur Deepmind (la partie 1 de ce post) et sur les fondateurs de Adallom et wiz.io, me sont revenues en mémoire d’autres histoires de startup européennes ou fondées par des Européens. Je pense à Spotify (voir mes posts en 2022 et 2018) ou VMWare (voir un post plus ancien de 2010). On y voit que l’ambition plus ou moins jugulée a conduit à des résultats différents. Wiz ou Spotify ont des valorisations en dizaines de milliards, Deepmind, Adallom et VMWare (1ere acquisition) en centaines de millions alors que la seconde acquisition de VMWare fut également en dizaines de milliards. Je ne sais pas s’il y a un pattern ou si je le crée artificiellement, mais c’est un peu comme si une acquisition en centaines de millions était un semi-échec lié à la crainte d’une concurrence trop forte ou de l’impossibilité de poursuivre une aventure indépendante.

La double aventure des fondateurs de Adallom et Wiz.io va un peu dans ce sens. J’ai lu quelques articles dont vous trouveez la référence en fin d’article. Et je vais donner les leçons tirées par Assaf Rappaport de ces deux histoires. Une première réussite, Adallom rachetée en 2014 par Microsoft pour $320M puis une seconde, wiz.com rque Google a proposé d’acheté il y a quelques jours poru $32B soit 100 fois plus… Contrairement à Deepmind, je n’ai pas eu accès à des documents précis, j’ai donc dû faire quelques hypothèses comme quelques autres (voir [2]) et recouper les informations disponibles en ligne. Voici les deux tables de capitalisation. Mais ici aussi, les conseils donnés (que je reprends plus bas) sont tout aussi importants que ces données.

Tout d’abord ce que je retiens des tableaux :
– Quatre fondateurs dont l’histoire est classique en Israel (voir [1]) créeen Adallom puis wiz.io. En réalité, moi qui ne suis pas un grand fan du concept de serial entrepreneurs, je me demande si wiz.io n’est pas plutôt le passage à l’échelle de Adallom comme VMWare (2ème période) le fut pour VMware (1ère période) ou en poussant très fort le prix Nobel de Demis Hassabis le passage à l’échelle de Deepmind ! On lit dans la presse que les fondateurs avaient gagné environ $25M avec Adallom selon certains et $3B avec wiz.io là aussi un facteur 100x environ.
– Les mêmes fonds de capital-risques et partenaires sont les investisseurs – Gili Raanan pour Sequoia puis Cyberstarts et Shardul Shah pour Index. C’est assez rares pour être mentionnés d’autant plus que ces fonds sont intervenus à l’amorçage.
– Pour Adallom, des multiples de 24x pour les series A, 7x pour le series B et 2x environ pour le series C.
– Pour wiz.io, des multiples de 475x pour le seed, 73x pour le A, 20x pour le B, 5x, 3,éx et 2,7x pour les C, D et E.

Tout cela est discutable, mais pas inintéressant et il y a un côté un peu loterie. Ne me méprenez pas. le succès est rare, jamais garanti. Je me souviens d’une startp à qui une propostion d’achat de $300M avait été faite. Fondateurs et/ou investisseurs ont décliné pensant qu’il valaient plus. Au final, l’acquisition se fit pour un montant de $10M.

A ce sujet il faut sans doute lire le point de vue sur Shardul Shah (Index) sur LinkedIn (Index Ventures just cemented its place as one of the all-time VC greats). J’en extrais et raduis un passage de citations : « Je ne sais pas pourquoi on parle de moyennes ; aucun de nous ne s’intéresse au retour à la moyenne. » […] « ​​Je ne recherche pas des rendements moyens. Je ne recherche pas de bonnes affaires, je recherche des valeurs aberrantes. » […] « ​​Je ne recherche pas le confort. Il faut accepter l’inconfort. Notre métier, c’est la prise de risque. Je ne suis pas un investisseur axé sur la valeur, n’est-ce pas ? Je crois à la loi de puissance. » […] « ​​Le plus difficile, c’est de savoir si l’on est dans l’illusion ou si l’on est convaincu. Parfois, la frontière peut sembler ténue. »

Enfin j’extrais les leçons de Assaf Rappaport :

1. L’équipe est plus importante que l’idée. Une startup ne se construit pas autour d’une idée, qui évoluera de toute façon, mais autour d’une équipe. Les meilleurs fonds de capital-risque investissent dans les talents, et non dans des produits, des idées ou des business plans. Autre point important : ne tardez pas à rencontrer les meilleurs fonds. Ne les laissez pas pour la fin.
2. Celui qui écoute les problèmes trouvera des idées. Lorsque vous rencontrez des clients, vous ne venez pas pour les convaincre, mais pour apprendre d’eux. Si vous avez parlé pendant plus d’un quart de la réunion, la conversation n’était pas intéressante. Les clients ont des problèmes dont vous ignoriez l’existence, et la meilleure façon de les découvrir est d’utiliser des points d’interrogation, pas des points d’exclamation. Autre point important : il faut un peu de chance.
3. « Non » est la bonne réponse pour déterminer le sérieux de l’investisseur. Quel que soit le type d’offre que vous recevez – investissement ou acquisition –, la seule réponse est : « J’apprécie vraiment votre offre, mais non merci. » Ce genre de réponse n’a jamais découragé un investisseur ou une entreprise déterminés – et s’ils ne le sont pas, ils n’investiront de toute façon pas. Autre point important : vous devez préparer un plan média, interne et externe ; en cas de fuite, vous n’aurez que le temps d’appuyer sur le bouton « Envoyer ».
4. La sortie n’est que le début d’un travail difficile. Au lendemain de votre fusion avec un géant, n’attendez pas que les options vestent. Adoptez plutôt une approche commando : nous faisons partie d’une grande armée, mais nous appartenons à une unité d’élite.
5. N’ayez pas peur de l’activisme. Dans toute entreprise, il arrive un moment où il faut donner un coup de pouce aux dirigeants conservateurs, puis passer à l’action. Pour offrir un environnement de travail optimal et recruter les meilleurs collaborateurs, il faut faire preuve de courage et prendre position, en s’engageant dans un militantisme social qui favorise un formidable esprit d’équipe.
6. Respirez profondément et n’expirez pas trop vite. Ne vous laissez pas aveugler par l’argent : utilisez-le plutôt pour acquérir rapidement des clients payants, refuser des offres d’acquisition de plusieurs centaines de millions de dollars et développer rapidement votre entreprise pour en faire une licorne.
7. Aujourd’hui, il est possible de surpasser tout le monde avec un ordinateur et Zoom.

A nouveau la prise de risque et l’ambition sans limite.

Références :
[1] : 7 lessons from reaching a $1.7 billion valuation in just one year https://www.calcalistech.com/ctech/articles/0,7340,L-3904610,00.html
[2] : WIZ, Esprit, es-tu là? Comment les fondateurs de Wiz refont des miracles après le succès d’Adallom https://trivialfinance.substack.com/p/wiz-esprit-es-tu-la

Deux belles histoires de startups récentes (pas dans la Silicon Valley, mais toutes deux acquises par Google) – partie 1 : DeepMind

Je dois probablement admettre que j’ai un penchant pour les startups dirigées par des fondateurs tech. C’est ce que je défends depuis des décennies. Alors, quand je lis des histoires qui vont dans ce sens, je suis plus que ravi. Récemment, des amis m’ont parlé d’un documentaire intituléThe Thinking Game.

Je ne sais pas pourquoi je n’avais pas analysé DeepMind plus tôt, d’autant plus qu’il est assez facile de trouver des informations sur les entreprises britanniques, et il s’agit d’une startup britannique. Vous m’avez bien lu ! J’ai établi sa table de capitalisation lors de son acquisition par Google en 2014 pour environ £400M.

Ce que j’ai lu dans la table :
– 3 ou 4 cofondateurs principaux, mais Demis Hassibis détenait la plus grosse participation initiale (80 %).
– Les investisseurs ont pris un risque élevé car l’entreprise ne disposait initialement que de peu de choses si ce n’est de talent (et aucun chiffre d’affaires avant son acquisition ?).
– Les investisseurs principaux, ou du moins les plus célèbres, étaient Peter Thiel et Elon Musk.
– L’entreprise n’a pas levé beaucoup de fonds : 2 millions de livres sterling en février 2011, 15 millions en décembre 2011/février 2012, puis 25 millions en 2013, avant son acquisition par Google pour 400 millions en janvier 2014.

Voilà pour les données de base. Plus importantes encore, les leçons de l’article que mes amis m’ont envoyé sont les suivantes :
– Premièrement, DeepMind allie une clarté stratégique irréprochable à une flexibilité tactique infinie. Ce qui transparaît dans le film, c’est l’extraordinaire propension de l’entreprise à expérimenter sans relâche et à échouer sans cesse.
– Deuxièmement, la mission de DeepMind l’a aidée à recruter des scientifiques talentueux, essentiels à sa réussite. Lors d’une discussion après le film, Hassabis a expliqué qu’il avait toujours résisté à la pression des investisseurs pour déménager dans la Silicon Valley et qu’il était déterminé à rester à Londres. « Le Royaume-Uni a toujours été très fort en science et en innovation et possède une riche histoire en informatique », a-t-il déclaré. « Nous essayons de perpétuer cette tradition.» Hassabis estimait qu’il y avait beaucoup de talents universitaires sous-utilisés en Europe, et ailleurs, qui pourraient être attirés par Londres. Et c’est ce qui s’est avéré.
– Troisièmement, la réussite de DeepMind a été essentielle à sa capacité à évoluer rapidement. En 2010, peu de capital-risqueurs étaient prêts à s’approcher d’une startup aux ambitions aussi extravagantes et dépourvue de business plan. Une grande partie de son capital initial provenait d’investisseurs américains, dont Peter Thiel et Elon Musk. L’entreprise s’est également sentie obligée de se céder à Google en 2014 pour se doter des capitaux, des données et de la puissance de calcul nécessaires pour rester à la pointe de l’IA. (Ces ressources supplémentaires étaient également essentielles pour recruter et fidéliser les meilleurs talents.)

Souvent, pour ne pas dire toujours, les mêmes leçons sur la prise de risque et l’ambition…

PS : Je n’ai pas encore regardé le film, je modifierai donc peut-être ce message dans un avenir proche.