Archives de l’auteur : Herve Lebret

Répartition des actions dans les start-up

Comme suite à des posts plus tôt dans l’année sur l’évolution de l’actionnariat dans des start-ups (Kelkoo, Skype, mysql), voici une analyse plus générique sur le processus du partage des actions. Le document est au format pdf. je l’ai utilisé assez régulièrement depuis 2006 pour des étudiants, des chercheurs et des entrepreneurs et je le crois utile même s’il n’est pas nouveau dans substance. A la fin, le lecteur pourra trouver d’autres exemples réels célèbres et moins célèbres.

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Depuis la création où quelques fondateurs se partagent les premières actions jusqu’à la sortie (IPO ou vente), en passant par de possibles tours de financement, les actions seront réparties, partagées entre fondateurs, employés et investisseurs. Il s’agit donc d’une des décisions les plus importantes pour une start-up et elle doit être gérée avec une très grande attention.

Biotech UK et US

Une autre illustration des différences entre Etats-Unis et Europe : la croissance des biotech US et UK. Le texte intégral se trouve sur Nature Biotechnology et mon ami André m’a mentionné le blog Corante où il a découvert l’information.

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Et voici la conclusion du blogger (en Anglais) :

« What I found interesting about the editorial, though, wasn’t these conclusions per se – after all, as the piece goes on to say, they aren’t really a surprise […] No, the surprise was the recommendation at the end: while the government agency that ran this study is suggesting tax changes, entrepreneur training, various investment initiatives, and so on, the Nature Biotechnology writers ask whether it might not be simpler just to send promising UK ideas to America. 

Do the science in Great Britain, they say, and spin off your discovery in the US, where they know how to fund these things. You’ll benefit patients faster, for sure. They’re probably right about that, although it’s not something that the UK government is going to endorse. (After all, that means that the resulting jobs will be created in the US, too). But that illustrates something I’ve said here before, about how far ahead the VC and start-up infrastructure is here in America. There’s no other place in the world that does a better job of funding wild ideas and giving them a chance to succeed in the market. »

Un livre sur les entrepreneurs

Après avoir lu Founders at Work de Jessica Livingston, je me suis plongé dans un ouvrage plus ancien de Michael Malone.

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C’est le même principe, à savoir 16 interviews d’entrepreneurs high-tech. Sa lecture est enrichissante. En voici quelques extraits:

Larry Ellison sur l’incertitude:

When everyone said a relational database would never be commercially viable, the reckless guy said “maybe everyone’s wrong – maybe I will take a chance with my career and with my cash.” It’s not a rational process.Larry Ellison à nouveau à propos des entrepreneurs: “I saw outside managers brought into a lot of companies who then made things dramatically worse. I think I was the best person for the job, I knew the company better than anyone else. I knew the technology, the products and the markets. My heroes are people who do not follow convention. It’s difficult to innovate when you are like anybody else.”T. J. Rodgers sur la Silicon Valley: “One of the things that Silicon Valley successful is companies think just about wanting to succeed. It is also a meritocracy. What makes us so special and different is no Java code or biotechnology, it is that we’re truly capitalists. About Europe and Japan: We’re moving at light speed relative to the Japanese, who probably still have a committee working on the problem and the Europeans, who are trying to work it out politically. ”Tom Siebel à propos de la chance: “If you look at the core of many success stories, it’s not great visionaries, not great technology, not great entrepreneurs, it’s pretty bright people who found themselves in the right place at the right time and managed not to foul up the opportunity.”Gordon Moore sur la Silicon Valley. “I really measure the thing that’s become Silicon Valley from Shockley in 1956. There were earlier technology companies – Hewlett Packard and Varian – but they were more like established companies on the East Coast. Shockley introduced some instability in the system. ”

Si vous voulez en savoir plus, à vous de le lire…

A suivre:  “Once you’re lucky…” et “In the Company of Giants

Aart de Geus reçoit la Kaufman Award

J’ai récemment eu l’occasion de parler d’EDA sur ce blog. Aart de Geus, un Européen, un Hollandais qui a étudié à l’EPFL à Lausanne, vient de recevoir la Kaufman Award, le Nobel de l’EDA. Un des articles sur le sujet a été publié par EDN News.

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Aart de Geus est une des icones de la Silicon Valley. Il est venu à l’EPFL faire une présentation tout à fait exceptionnelle qui résume magnifiquement l’histoire de Synopsys.

Quand, dans une autre interview,  il parle des raisons pour un Européen de partir aux USA, il parle de quête. Comme si ces Européens n’avaient pas trouver chez eux ce qu’ils cherchent…

Quant à l’EDA, je lui consacre un chapitre entier dans mon livre tant elle me semble révélatrice des hauts et bas, des dynamiques de la Silicon Valley…

les débuts de Google

Une très jolie interview des fondateurs de Google qui date de 1998!

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Quelques leçons:

A propos des réseaux de personnes: « Sergey: Basically, we talked to our advisers and other faculty whom we knew. And they just pointed us to other people. Pretty soon, we had investors, we had a lawyer, we had everything that we needed. »

A propos de la prise de risque: « Larry: Silicon Valley is a little bit different. There’s not so much risk to us. If you fail in starting your company, you’re actually more fundable. You may have failed for some reason not involving yourself at all, just [due to] some random factors... Sergey: The main risk is really our time. We’re working much, much harder than we would in a normal job. It’s not a 40 hour a week job. »

plus en cliquant ici…

La Silicon Valley est-elle en danger?

Voici une interview vidéo sur la Silicon Valley. Elle est inquiétante et je ne peux pas être en total désaccord: l’industrie high-tech murit si bien que l’innovation pourrait y être moins critique. Les VCs sont en crise même s’ils l’admettront pas ouvertement. La prise de risque disparait. « Engineers are gun shy of start-ups ». Quel terrible message…

Bien sûr on peut aussi réagir car ceci n’est pas nouveau. : Silicon Valley Fever est un livre de 1984 qui décrivait déjà très bien les ennuis des start-ups et des ingénieurs. On a régulièrement entendu la complainte « trop d’argent pour trop peu d’opportunités ».

Quoi qu’il en soit, je vous laisse découvrir, apprécier, voire commenter.

PS: merci à Andre M. pour avoir attirer mon attention sur ce document.

Innovation en France

Je viens de lire un excellent rapport sur l’innovation et les régions françaises. L’innovation, inutile de le rappeler trop, est un sujet complexe. La profondeur de l’analyse des auteurs, Thierry Madiès et Jean-Claude Prager, de Innovation et compétitivité des régions est remarquable. Pourtant le sujet est loin d’être facile à analyser, mais l’impression qu’il laisse est forte. On y trouvera toujours à redire, je ferai quelques remarques plus loin mais je le trouve vraiment très bien fait.

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Du côté de la synthèse en profondeur, j’ai beaucoup aimé leur panorama sur les théories fondatrices des politiques régionales :

1. Base d’exportation

Cette approche, une des plus anciennes des théories de la croissance régionale, est une transposition territoriale des modèles de croissance post-keynésiens. Les activités d’exportation sont l’élément principal de la dynamique économique régionale alors que la croissance des branches productrices des biens et services pour le marché local dépend de la croissance du secteur d’exportation. Le développement de la région est conditionné par la demande externe dont l’effet multiplicateur est lié à la propension marginale à consommer localement ; la compétitivité de la région dépend principalement de l’accumulation des ressources et l’investissement dans les secteurs de la base, en fonction de leurs résultats et de mesures politiques incitatives à la localisation d’entreprises de ces secteurs.

2. Croissance endogène

La théorie de la croissance endogène spatiale est le paradigme dominant de la croissance régionale et des agglomérations urbaines. Le modèle « Marshall- Arrow-Romer » met l’accent sur le rôle primordial dans le progrès technique de l’accumulation des ressources humaines et leur niveau de qualification, l’importance de la R&D, en ajoutant la dimension territoriale des externalités et des rendements croissants (Glaeser et alii, 1992 et Audrestsch, 1998). Le rôle des politiques publiques est donc de développer le niveau de formation de la population, de renforcer les interactions entre les entreprises et les producteurs de connaissances, et de jouer sur la concentration des activités.

3. Théorie néo-schumpétérienne

L’accent est mis sur l’innovation comme moteur de la croissance dans un monde où la concurrence entre les entreprises se fait principalement par l’innovation (Baumol, 2002). Le « milieu innovant » est décisif pour la réduction des risques et le développement des réseaux de connaissance (Camagni, 1991 et Aydalot, 1985) car l’entrepreneur dépend de son milieu, qui lui offre un cadre favorable ou non à son succès. Les agglomérations urbaines développées sont plus propices que les autres régions car elles contiennent des ressources et un réseau dense d’infrastructures variées qui permettent de mieux faire face aux nombreuses incertitudes de l’entreprise en création ou en développement (Scott, 2004). Les recommandations politiques portent sur l’utilité d’un agent coordonnateur pour l’animation du milieu et encourager l’esprit d’entreprise tout en favorisant la concurrence, considérée comme le moteur principal de l’innovation.

4. « Théorie » des clusters

L’approche clusters (Porter, 1990) est devenue un élément incontournable des doctrines de développement régional, d’autant plus populaire que sa définition est incertaine et sa base, aussi bien théorique qu’empirique, fragile (Enright, 2002, Martin et Sunley, 2002 et Maskell et Kebir, 2005). C’est une reprise de l’analyse de la base économique fondée non pas sur les secteurs d’activité mais sur les grappes d’entreprises appartenant à la même chaîne de valeur. L’environnement microéconomique des clusters détermine leur compétitivité. Le « diamant » de Porter comprend quatre dimensions principales : les inputs de l’innovation, le contexte local de la concurrence, la nature de la demande locale, et l’intensité des réseaux entre les entreprises du cluster. C’est le « mix » de clusters qui fait la compétitivité d’une région. La « théorie » considère que le développement et le déclin des clusters obéit à un processus biologique et est plutôt réservée sur l’intervention directe des pouvoirs publics dans le développement des clusters. L’influence politique de cette approche a cependant été considérable.

5. Théorie institutionnaliste

Dans la mesure où l’activité économique est considérée comme d’abord « enchâssée » dans la vie sociale, le capital social d’une région, c’est-à-dire l’ensemble des comportements, formes et institutions publiques et privées (Putnam, 1993), représente un élément central de l’environnement des entreprises et de leur compétitivité (Amin, 1999 et Casey, 2004). Les études empiriques sur le lien entre le capital social et la croissance économique ne sont cependant pas concluantes, notamment pour distinguer un effet régional spécifique différent des données nationales (Casey, 2004 et Beugelsdijk et van Schaik, 2005). L’évolution de la région est conditionnée par un phénomène de « path dependency ». Les politiques de développement doivent s’adresser à la base institutionnelle sous ses formes les plus diverses (associations d’entreprises, organisations politiques locales…) pour contribuer à la richesse des réseaux sociaux et à leur flexibilité ; l’implication de ces réseaux dans la gouvernance collective est une dimension majeure de cette capacité institutionnelle et de l’inclusion sociale qui permettent la mobilisation la plus large des ressources de la région et devient ainsi, en tant que telle, un objectif central des politiques économiques.

6. Théorie évolutionniste

La doctrine évolutionniste considère que la compétitivité des régions dépend de leur capacité à renouveler leur base économique face au processus de destruction créatrice (Boschma, 2004). Les facteurs précis de la meilleure capacité d’adaptation de certaines régions à de nouveaux paradigmes technicoéconomiques restent cependant un sujet de débats ; les régions tendent à développer des institutions et des comportements collectifs routiniers, à se spécialiser dans des secteurs d’activité qui les enferment dans des rigidités et risquent de verrouiller le système d’innovation. Le rôle des politiques publiques est plus large que celui de la simple correction des défaillances de marché ; il est de guider les agents économiques pour faire face à des changements dans la structure du marché, grâce au pouvoir de l’État de peser sur la coordination des anticipations des agents face aux changements structurels, même si sa capacité d’agir directement sur l’évolution des systèmes économiques est réduite et si son information n’est pas supérieure à celle des agents privés (Moreau, 2004). Les politiques doivent renforcer en permanence la capacité d’adaptation, réduire les rigidités des systèmes régionaux d’innovation, encourager la formation permanente de nouveaux réseaux de connaissance ouverts sur l’extérieur, tout en s’appuyant sur leurs forces les plus marquées tout en facilitant les secteurs émergents qui correspondent le mieux à leurs potentialités. Il s’agit donc d’accepter un certain degré d’incertitude dans des choix stratégiques qui passent par la caractérisation de signaux faibles.

7. Théorie culturelle

Le rôle de la dimension culturelle dans le développement des régions a été bien mis en lumière dans l’analyse comparée du développement de la Silicon Valley et de la région de Boston (Saxenian, 1994). C’est l’ouverture culturelle de la région californienne qui lui assuré sa prééminence mondiale dans les nouvelles technologies malgré les atouts économiques meilleurs au cours des années soixante-dix de Boston. La diversité culturelle, l’ouverture des régions sur l’extérieur et leur capacité à développer une « classe créative » sont donc un moteur majeur du développement des grandes villes et des régions et contribuent à en faire des « aimants » des talents et de la technologie (Florida, 2002).


Est-il nécessaire de dire à quel point je suis sensible à cette septième théorie, mais aussi à leur citation de Schumpeter « L’innovation passe par les entrepreneurs ».

Et que dire de leur analyse de la Silicon Valley :

Les facteurs de succès du modèle de régulation par le marché de la Silicon Valley

Les facteurs de succès sont les suivants :

• un environnement favorable à l’entrepreneuriat ;

• un niveau exceptionnel de chercheurs (150 000 dans la région) ;

• une main d’œuvre de haut niveau et fortement flexible ;

• un attracteur des talents à l’échelle mondiale ;

• une méritocratie tournée vers les résultats ;

• une culture du risque et de l’échec ;

• des universités orientées vers l’industrie ;

• une qualité de vie exceptionnelle ;

• des réseaux de contacts nombreux et nourris ;

• une forte infrastructure de services et d’organismes financiers. Mais également des crédits de recherche publics de 3 % du PIB régional, à la fois raison et conséquence de ce dynamisme unique au monde.

 

La belle synthèse qu’un des auteurs fait dans un autre rapport qui décrit la Silicon Valley est passionnante (et brève !). Les auteurs sont très nuancés sur les indicateurs de l’innovation, ils montrent bien aussi la difficulté à imiter cette Silicon Valley tant elle semble ne pas avoir été planifiée.

Si j’ai une réserve à faire c’est de n’avoir pas trouvé assez les mots de passion et folie. Mais nous sommes là dans le quantitatif. Mon récent post sur le livre de Lee Smolin n’est pas étranger à la problématique. Les auteurs mentionnent eux aussi d’ailleurs la difficulté à trop séparer recherche fondamentale et recherche appliquée (page 44). Ce qui est étonnant avec la Silicon Valley est qu’à la limite, l’innovation peut venir d’ailleurs dans le sens où Netscape est issue de Mosaic, créé dans l’Etat d’Illinois (tout comme le web au Cern près de Genève).  Comment analyser le qualitatif hors de l’anecdote comme le fait Smolin pour la recherche ou le livre Founders at Work pour les start-up ? Robert Noyce, fondateur d’Intel ne disait pas autre chose : « “Look around who the heroes are. They aren’t lawyers, nor are they even so much the financiers. They’re the guys who start companies »

Ce rapport me rappelle aussi Victa que j’avais il y a quelque temps brièvement décrit. Nous faisons de gros efforts pour innover, mais au bon endroit ? Je crois que le capital humain est critique comme l’indique les auteurs. Mais comment le développer est loin d’être simple tant la prise de risque, l’acceptation de l’incertitude et la tolérance de l’échec sont nécessaires. Or il faut aussi contrôler, surtout l’argent public. Or un échec peut être plus riche d’enseignements qu’un succès… Quand les auteurs par exemple proposent de « concentrer sur les grandes priorités », je ne suis pas sur que l’internet pouvait être vu comme une grande priorité entre 1990 et 1993-94. Incertitude à nouveau.

PS : mon post en anglais fait allusion à un autre rapport, What is the right strategy for more innovation in Europe?, lui aussi très intéressant…

Rien ne va plus…

Je viens de lire (en anglais) Rien ne va plus en physique ! : L’échec de la théorie des cordes de Lee Smolin (mais aussi Alain Connes pour la version française). Quel est le rapport avec l’innovation et les start-up ? Je vois un lien : dans mon livre je mentionne Thomas Kuhn à travers son livre La Structure des révolutions scientifiques. Je crois qu’innovation et recherche ont bien des similitudes, par exemple dans leurs progrès. Un des sujets que Smolin aborde est l’absence de progrès en physique théorique. N’avons-nous pas des problèmes similaires avec l’innovation ? J’avais aussi cité dans mon livre Pitch Johnson, un des pionniers du capital-risque : « La démocratie fonctionne mieux quand il y a un peu de turbulence dans la société, quand ceux qui ne sont pas encore à l’aise peuvent grimper l’échelle économique en utilisant leur intelligence, leur énergie et leur habileté pour créer de nouveaux marchés ou mieux servir les marchés existants. »

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Smolin analyse que la science a besoin de deux ingrédients : de l’éthique et de l’imagination. Si la science établie et ses scientifiques ne permettent pas l’émergence d’une nouvelle génération et de nouvelles idées, la crise n’est pas loin. C’est ce qu’il analyse brillamment (son livre dit aussi beaucoup d’autres choses passionnantes).  Quand des figures de la Silicon Valley telles que Joe Costello ou Richard Newton prétendent que la Silicon Valley ne prend plus assez de risques et devient « greedy », j’y vois des similarités…

La composante humaine de l’équation capital-risque.

Un post intéressant de Fred Wilson pose la question du remplacement nécessaire des fondateurs par du management expérimenté « The Human Piece of the Venture Equation ». Je n’ai pas pu m’empêcher de réagir à son post puisqu’il s’agit de mon sujet favori : la passion dans les start-up. Voici ce que j’ai écrit.Le sujet est en effet passionnant. Comme ancien étudiant dans la Silicon Valley et comme ancien VC, j’ai vu beaucoup, beaucoup de start-up et de fondateurs. Mon intuition est que dans un monde idéal, le fondateur devrait être CEO aussi longtemps que possible. Laissez-moi faire une analogie (que j’utilise souvent) : une start-up est un bébé dont les fondateurs sont les parents. A moins qu’ils en soient totalement incapables, ils auront la responsabilité de son éducation. De nombreux « spécialistes » les assisteront (enseignants, médecins, etc.). Et bien sûr, ils feront des erreurs parfois mortelles. Cela ne veut pas dire pour autant qu’ils doivent le/la contrôler indéfiniment. Ca n’est pas du tout souhaitable (pour les parents du moins !). Et laissez-moi ajouter, mais peut-être suis-je devenu trop conservateur, que deux parents/fondateurs sont la formule idéale pour le bébé/start-up.

Je suis donc en accord avec la remarque de Wilson “nothing can replace the entrepreneur’s passion and vision for the product and the company. If you rip that out of the company too early, you’ll lose your investment. I think it’s best to wait”. J’ai publié Start-Up juste avant de lire “Founders at Work”, l’excellent livre de Jessica Livingston. J’ai essayé d’élargir la perspective car je ne suis pas sûr que l’Internet et le Web2.0 aient fondamentalement changé le problème. Oui, vous pouvez bâtir plus vite et à moindre coût mais Hewlett et Packard avaient un peu plus de 25 ans quand ils fondèrent HP en 1939. Gates, Jobs et Dell ne sont pas les premiers gamins des start-up. Il ne s’agit pas que d’ordinateurs et de logiciels. Je crois qu’il s’agit de passion, qui est peut-être plus importante encore que l’expérience. Il s’agit de mon intuition et sans doute des études approfondies seraient utiles à l’analyse. La Passion est un des mes sujets préférés.

Un dernier point. Faut-il remplacer le CEO quand “the CEO’s job goes from managing the product, writing a little code, doing customer support, and raising money to managing people and teams, processes and priorities.” Je n’en suis pas sûr. Je suis en accord avec cette remarque, mais aussi avec ce que Wilson dit plus tard quant au rôle du CEO dans la définition de la vision et de la stratégie. Ne peut-on pas demander aux autres managers dont le COO de maîtriser les processus ? Quand Logitech fut en difficulté, son fondateur, Daniel Borel, confia les rênes à un nouveau CEO, ancien homme de marketing chez Apple. C’est au moins sur le marketing qu’il redessina Logitech. L’histoire bien sûr unique de Steve Jobs a des similitudes (« Inside Steve’s Brain » est une autre lecture intéressante.)

Il est difficile de résoudre l’équation capital-risque et elle inclut de nombreux éléments contre-intuitifs. Elle n’est ni blanche, ni noire. Vous avez besoin de passion et d’expérience et par définition, on retrouve rarement les deux ingrédients chez la même personne. Voilà un autre argument pour l’utilité d’avoir deux fondateurs. Google a parfaitement résolu l’équation avec la venue d’Eric Schmidt car il n’y a aucun doute que les deux fondateurs restent essentiels pour leur start-up.

Win, Win, Win

J’ai pris connaissance hier du 2008 Academic Ranking of World Universities réalisé par le Institute of Higher Education, Shanghai Jiao Tong University (IHE-SJTU). A nouveau les USA ont la part du lion: 8 dans le top 10 et 17 dans le top 20. Seuls le Royaume Uni (Cambridge et Oxford) et le Japon (Tokyo) entrent dans la liste. Le classement est beaucoup plus détaillé puisque qu’il donne le classement des 500 premières.

Lorsque j’ai publié “Start-Up”, j’avais eu une brève conversation avec Christophe Alix, journaliste à Libération, qui m’avait indiqué que je n’insistais pas assez sur le budget considérable dont le pentagone disposait pour la recherche et l’innovation. I Je n’avais rien à redire à l’argument et ma lecture récente d’un livre va en effet dans ce sens:

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“Creating the Cold War University- The Transformation of Stanford” de Rebecca S. Lowen est un livre intéressant. Il explique comment Stanford est devenue riche dans les années 50 et 60 grâce à l’argent public et aux contrats militaires et industriels. Frederick Terman, souvent considéré comme le père de la Silicon Valley, qualifia la situation de “Win-Win-Win”. Le gouvernement finançait la recherche fondamentale et appliquée (la différence entre les deux étant bien souvent floue) pour soutenir les efforts militaires durant la guerre froide, les industriels développaient des produits à partir des résultats de ces recherches (et n’avait pas toujours à payer cette recherche), et des sociétés telles que H-P, Varian, GE en bénéficièrent grandement. Enfin Stanford devint riche et excellente (ce qu’elle n’était pas dans les années 30).

Lowen explique que “by 1960, the federal government was spending close to $1B for academic research and university-affiliated research centers, 79 percent of which went to just twenty universities, including Stanford, Berkeley, Caltech, MIT, Harvard and the University of Michigan” (page147). Dans le classement de Shanghai, Harvard est #1, Stanford #2, Berkeley #3, MIT #5, Caltech #6 et Michigan #18 seulement…

Clairement l’argent aide. J’avais tout de même réagi à l’argument de Alix car l’argent des militaires ne peut pas expliquer à lui seul l’esprit entrepreneurial qui s’est développé à Boston ou dans la Silicon Valley. Caltech et son JPL n’ont jamais eu la même activité de spin-off. Mais la qualité des universités et leur richesse reste un des ingrédients clés des clusters technologiques.