Il faut viser global tout de suite

Je ne fais pas la une si souvent, ce fut donc intéressant de me retrouver sur la page de l’EPFL ce matin. Tout ego mis à part, je parle de mes obsessions habituelles, du manque de croissance des start-up européennes. Vous pouvez lire l’entretien en cliquant sur l’image plus bas ou la lire à la suite.

Plus sérieuse sans doute, une analyse récente d’Oseo, l’agence française d’innovation, « Dix ans de création d’entreprises innovantes en France ». scrute 5500 start-up fondées entre 1998 et 2007.

On y découvre que 85% des entreprises sont toujours en activité 5 ans après leur création (contre 50% aux USA; j’avais déjà abordé le sujet dans Survie ou échec – quel succès?), elles emploient en général moins de 10 employés et une des explications de ces difficultés est liée au réseaux relationnels. Rien de bien nouveau dans tout cela, si ce n’est peut-être « plus de 50 % des entreprises innovantes se positionnent d’emblée sur les marchés étrangers, et plus de 30 % adressent uniquement des marchés étrangers ».

« Il faut viser global tout de suite »

10.02.12 – Comment se lancer dans la création d’entreprise? Hervé Lebret, spécialiste des start-up et en charge du programme innogrant à l’EPFL, répond à nos questions. « En matière de start-up, il faut viser global tout de suite », estime Hervé Lebret, responsable des Innogrants, outil de soutien aux entrepreneurs académiques. Il estime les suisses et les européens trop frileux en matière de création de jeunes pousses. Chargé de la rédaction d’une chronique mensuelle dédiée aux start-up, dès lundi prochain sur le nouveau site de l’EPFL, il s’est prêté au jeu de l’interview.

Le contexte économique actuel rend-t-il la recherche de fonds plus difficile?
Je vais peut-être vous surprendre mais je trouve que ça n’a pas changé. C’est difficile de trouver de l’argent, comme toujours, mais pas impossible. Cela dépend des domaines, mais je dirais même qu’il y a plus d’argent aujourd’hui qu’il y a quinze ans. Des entreprises comme Scala ou Aleva, issues de l’Ecole, ont levé d’importantes sommes de la part des Capital risqueurs ces dernières années, tout comme Aïmago, Lemoptix ou Attolight qui ont obtenu 1-2 millions de la part de Business Angels.

Y a-t-il des domaines plus porteurs que d’autres ?
C’est plus facile si le savoir-faire est présent localement, comme c’est le cas ici dans le domaine des biomeds ou des nanotechnologies. Les cleantechs commencent à perdre l’engouement qui prévalait jusqu’à dernièrement. Mais je suis convaincu que les idées peuvent sortir de n’importe où et obtenir un bon écho, pour autant qu’elles soient bien relayées. Il ne faut d’ailleurs pas trop se fier aux besoins actuels du marché. Ils ne suffisent pas à prédire quelle start-up va être la prochaine pépite. Les domaines porteurs ont des besoins, mais pas de solution immédiate et lorsque cette dernière arrive sur le marché les premiers ont souvent évolué dans une autre direction.

Comment s’assurer un bon départ avec une start-up ?
Une start-up sur dix parvient à être financée par du capital risque comme Aleva ou Biocartis et atteint la taille de 50 à 100 employés. Puis parmi celles-ci, un dixième aura un gros succès sur dix ans, comme Endoart ou Swissquote qui dépasse les 400 emplois. L’ambition ne devrait pas être la survie. Au contraire, ces jeunes poussent durent parfois trop longtemps. Quelque 90% sont encore là après 5 ans, mais elles n’ont pas grandi. Aux Etats-Unis, il y a davantage de renouvellement : 50% seulement sont encore là passé le même laps de temps. Le problème c’est le conservatisme européen qui n’ose pas la croissance rapide. Je pense qu’il faut rendre les étudiants sensibles à ça très tôt, déjà au gymnase. Etre entrepreneur ne s’improvise pas. Il faut donner aux enfants, aux jeunes, l’envie d’explorer et ne pas stigmatiser l’échec comme c’est encore le cas actuellement en Suisse. Nous allons d’ailleurs projeter bientôt un documentaire passionnant – Something Ventured – au sujet des étudiants curieux de l’entrepreneuriat.

Comment faire sa place ?
Il est relativement facile, avec une bonne idée, de trouver jusqu’à 500’000 frs de fonds publics ou d’associations philantropiques, ce qui permet de survivre un ou deux ans. Ces contacts permettent aussi un marketing gratuit qui peut permettre de trouver de premiers business angels et un premier million. Les limites viennent plus de la trop grande humilité, de l’autolimitation du jeune entrepreneur. Pour réussir, il faut être vendeur et extraverti ou s’allier avec quelqu’un d’autre qui l’est. Le réseau est une aide essentielle pour se positionner.

Quelle est l’importance des start-up dans le tissu économique suisse ?
Il y a environ 40 start-up créées chaque année dans le canton de Vaud, dont 15 dans le domaine académique. Elles jouent un rôle considérable pour l’avenir du canton, de la Suisse et même de l’Europe. Logitech ou Swissquote, par exemple, ont créé beaucoup d’emplois. Cependant, les start-up suisses de manière générale ont de la peine à dépasser les 5 à 6 postes de travail. Le plus grand problème est bien connu : c’est la frilosité des entrepreneurs, qui ont du mal à les faire croître. Ils préfèrent y aller par étape. Aux Etats-Unis, la politique du «tout ou rien» prévaut et amène à un taux de réussite plus important. Facebook, qui annonce son entrée en bourse, en est déjà à 3’000 employés. Les personnes qui ont de bonnes idées foncent et n’ont pas peur de l’échec. Ils visent d’emblée des marchés globaux. La première erreur est de penser en premier lieu au marché suisse, alors qu’il faudrait directement viser le marché mondial. Adopter une vision globale et ne pas avoir peur de paraître arrogant est essentiel.

Auteur: Cécilia Carron – Source: Mediacom

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