Archives mensuelles : août 2015

Pourquoi l’Europe ne crée-t-elle pas de Google ou d’Apple?

Ceci est ma nouvelle contribution à Entreprise Romande . Au milieu de mes résumés de In the Plex, je pense qu’il s’agit d’une coïncidence intéressante. Réagissez si vous le souhaitez…

ER-Aout2015-EuropeanGoogle

Pourquoi l’Europe n’a-t-elle pas créé Apple, Google ou Tesla? Ou faudrait-il dire pourquoi n’avons-nous ni Steve Jobs, Larry Page ou Elon Musk sur le vieux continent ? L’innovation est affaire complexe où le succès ne survient que lors d’un alignement très improbable de planètes que sont un produit, un marché, des fondateurs et une équipe qu’ils auront su réunir, du capital, voire une situation macroéconomique favorable. De plus on ne peut pas ignorer, dans la réussite d’une start-up, le facteur chance qu’implique cette conjonction improbable.

La récente et très réussie biographie d’Elon Musk [1], le fondateur de Paypal, Tesla Motors et SpaceX décrit de manière exemplaire comment un migrant d’origine sud-africaine, qui aurait pu faire de très brillantes études, prit des décisions risquées avec un acharnement presqu’inhumain pour bâtir des entreprises qui pourraient bien changer le monde. Il faut bien sûr se méfier du mythe du surhomme que la Silicon Valley a tendance à mettre en avant. Tous les succès du nouveau Steve Jobs dépendent d’un environnement favorable et hautement efficace. Mais pourquoi l’Europe et la Suisse ont elles si rarement de « role models » similaires à nous présenter ? Nous avons bien sûr Richard Branson ou la dynastie Hayek et de récentes analyses montrent que l’Europe a aussi ses « unicorns » [2], mais la comparaison montre une Europe « peu farouche ». Alors pourquoi ?

L’analyste sérieux et compétent saura montrer les multiples avantages des Etats Unis : une R&D publique discrète mais considérable, notamment dans le domaine militaire, un marché du capital extrêmement efficace, un marché homogène et parfois protectionniste, et une politique et une économie diaboliquement agressives à la limite de l’impérialisme. Mais le pamphlétaire plus pessimiste pourra aussi constater un vieux continent justement vieillissant, des migrants vus comme des menaces – alors qu’ils constituent la sève de la Silicon Valley – et surtout un manque d’ambition de la jeunesse, encouragé par une société aux rêves éteints.

Le mal est profond. On dit à un jeune diplômé encore plein de rêves d’aller faire ses griffes dans le privé pour acquérir compétence et expérience. Mais quelle entreprise européenne a eu des rêves de véhicules électriques et de voyages interplanétaires ? Pire encore, on dit aux enfants de bien s’intégrer avant tout et l’on en oublie de les laisser rêver plus loin. L’école n’encourage pas les folles aventures et dans cet environnement et les rêveurs retombent vite des étoiles sur le plancher des vaches.

Cinq start-up de l’EPFL ont été vendues récemment (Sensima, Jilion, Lemoptix,Composyt et Aïmago) à la grande satisfaction de leurs fondateurs et de nombreux autres seront ravis de bâtir de solides PMEs avec une cinquantaine d’employés. Mais quand je leur dis qu’aux Etats-Unis leurs homologues rêvent de changer le monde, ils me regardent d’un drôle d’œil. Ils me répondent tout comme leurs investisseurs que nous ne sommes pas sur la même planète et que les modèle allemand ou suisse des PME est une aussi belle alternative. L’ambition est vue comme de l’arrogance et un ingénieur n’aime ni l’incertitude ni le risque de l’échec.

Que de souffrances inutiles pour les rares exceptions. Certains souffrent de conseillers ou investisseurs, parfois incompétents, le plus souvent bienveillants mais n’ayant pour références que nos modestes succès. « Prouve que ton modèle peut d’abord fonctionner ici ». « Ne va pas chercher trop d’argent ». « Tu perdras le contrôle et tu seras remplacé ». Sans oublier les lectures tatillonnes de business plan dont chacun devrait savoir qu’ils ne sont que l’expression d’une vision. Au point que je leur conseille parfois de partir s’ils le souhaitent…

Je vais rester optimiste car Skype et Spotify sont de récents contre-exemples encourageants et l’Europe a pris la mesure de la menace, je crois. Je vais surtout rester optimiste car l’entrepreneuriat est affaire d’exceptions et je côtoie des jeunes gens qui ont encore quelques rêves. Mais s’il vous plait, ne les éteignez-pas !

[1] Elon Musk : Tesla, SpaceX, and the Quest for a Fantastic Future par Ashley Vance; Ecco – mai 2015.
[2] http://www.bloombergview.com/articles/2015-06-16/europe-s-tech-unicorns-are-so-tame

Google dans le Plex – Partie 2: … et une entreprise

Après ma première partie sur le livre In the Plex, voici la suite et même si je vais revenir sur le sujet dans la partie 3 laissez-moi commencer avec ceci: les Googlers aiment les plaisanteries et en particulier le 1er Avril. Personne ne savait à quel point Google était une réussite, avec une forte rentabilité depuis quelques années …

in-the-plex-home

Le jeu de cache-cache se termina le 1er Avril 2004. Comme conséquence de son entrée en bourse prochaine, la société était obligée de partager des informations internes aux banquiers qui étaient candidats à l’introduction en bourse de Google. Les financiers de Google avaient invité les banquiers à son siège, alors situé à Mountain View. A la veille de la réunion, George Reyes, le directeur financier et Lise Buyer, directrice du « Business Optimization », avaient mis au point un plan pour révéler le style secret de Google. Comme les banquiers avaient pris un gros pari en signant sans voir les chiffres, Reyes annonça directement qu’il commencerait par les performances financières. Il présenta donc des slides avec quelques chiffres. « On pouvait entendre une mouche voler, » se souvient Buyer. Les slides indiquaient en effet que Google avait fait de très bons profits. Pas époustouflants, mais plus que respectables, surtout pour une entreprise Internet offrant un service gratuit soutenu seulement par la publicité. Les banquiers écoutaient poliment, mais vous pouviez dire qu’ils avaient entendu dire que les choses avaient été mieux que bien, et ils étaient apparemment en train de refaire quelques calculs mentaux.
Puis Reyes dit aux banquiers qu’il était désolé, mais il avait par erreur montré la mauvaise diapositive. Pouvait-il montrer les chiffres corrects ? Le nouveau bilan apparut avec plus du double des revenus et des profits de diapositive précédente. Google avait dépassé les attentes les plus folles. Poisson d’avril! « George était impeccable », dit Buyer. «Ce fut un moment mémorable. »
[Page 70]

Qu’est-ce qu’un plan d’affaires?

Les fondateurs de Google n’avaient guère mis l’accent sur le côté business et financier de l’entreprise … Salar Kamanagar serait une recrue très inhabituelle:

Kamangar a plus que compensé son manque d’expérience grâce une calme détermination. Bien que placide et indépendant – et il détestait le feu des projecteurs – il savait faire preuve d’une détermination à toute épreuve. […] Kamangar avait fait une courte liste des entreprises pour lesquelles qu’il aimerait travailler – des start-up toutes nouvelles qui seraient prêts à parier sur quelqu’un comme lui et parce que, comme beaucoup d’étudiants de Stanford, il avait joué avec une première version de Google, il l’avait mis sur sa liste. Un jour de mars 1999, il avait vu dans le Stanford Daily que Google recrutait. Il est allé au centre étudiant de Tresidder et a trouvé Sergey Brin dans un petit stand. « Contrairement à ceux à qui j’avais parlé, il n’avait pas utilisé de jargon. Il avait une vision très claire, très ambitieux, – grandiose à certains égards – de ce que Google pourrait devenir, » se souvient Kamangar. Mais Brin n’était pas intéressé à l’embaucher. Kamangar était diplômé en biologie, pas un ingénieur. Même à ce stade, la préférence de Google allait aux étudiants en informatique. Kamangar persista. « Il revenait tous les jours et disait: « Je veux travailler gratuitement » », explique Ram Shriram investisseur, qui prenait un jour de congé d’Amazon chaque semaine pour aider à protéger son investissement dans Google. Brin a finalement accepté de le prendre à temps partiel pour faire des choses que les ingénieurs ne pouvaient pas faire, comme l’élaboration d’un plan d’affaires. « Aucun des deux fondateurs n’y avait d’intérêt », dit Shriram, « Ils ont dit, ‘Ouais, nous avons besoin d’argent, mais nous ne sommes pas vraiment intéressés à passer trop de temps là-dessus. Qu’est-ce qu’un plan d’affaires?’  » Quoi qu’il en soit, Google en avait besoin. Son financement initial d’un million de dollars avait été accordé uniquement sur la base de la technologie de Google. Mais la société a été déjà du mal à payer l’équipement – ses serveurs étaient dépassés par le nombre croissant de nouveaux utilisateurs et Brin et Page avaient besoin de coffres pleins pour financer leurs plans d’embauche ambitieux. Le capital risque pourrait répondre à leur ambition. Mais ils auraient à présenter un dossier crédible, montrant que Google pourrait un jour être rentable.
Kamangar est devenu ainsi la personne de contact dans l’un des plus étranges tours de capital-risque de l’histoire de la Silicon Valley. Shriram aidait, mais Salar eut un formidable niveau de responsabilité. Il a écrit les documents pour les présentations, a calculé les projections financières pour la valorisation, et, bien sûr, a élaboré le plan d’affaires. Bien qu’embauché à temps partiel, il passa à temps plein deux semaines plus tard, laissant tomber sa quête d’un second diplôme à Stanford. « C’était dix fois plus excitant que ce que je faisais à l’université », dit-il de Google.
[Pages 71-72]

« Quelle taille pensez vous atteindre ? »

[John Doerr, de Kleiner Perkins] avait vu beaucoup de nerds intelligents avec de bonnes idées et il était plus qu’heureux, sur la recommandation de Andy Bechtolsheim, d’en voir deux de plus. L’idée de Google, présentée avec les diapositives de Kamangar, était convaincante. Et ses fondateurs semblaient tout droit sorti du moule des précédents lauréats de Stanford. La réunion allait se terminer quand Doerr posa une dernière question: « Quelle taille pensez vous atteindre ? »
« Dix milliards », a déclaré Larry Page. Doerr est presque tombé de sa chaise. Non, a-t-il répondu Page, vous ne pouvez pas vous attendre à une capitalisation boursière de 10 milliards de dollars. Doerr avait déjà fait le calcul dans sa tête que la valeur optimale de Google pourrait peut-être atteindre un milliard de dollars. « Oh, je suis très sérieux », a déclaré Page. « Et je ne parle pas de la capitalisation boursière. Je veux dire le chiffre d’affaires. »
Plus d’une décennie après cette réunion, Doerr serait encore admiratif de la conversation. « Je ne pense pas qu’il pourrait le faire, mais j’étais impressionné, » dit-il. « Il n’y avait qu’à écouter le ton de la voix. Il ne disait pas cela pour m’impressionner. C’est ce qu’il croyait. C’était l’ambition de Larry, sans un style très réfléchi et considéré. »
[Page 73]

Une modèle d’affaire ou trois?

Le plan d’affaires après le tour de capital-risque prévoyait trois sources de revenus: Google vendrait des licences de sa technologie de recherche à d’autres sites; elle vendrait du matériel qui permettrait aux entreprises la recherche de leurs propres opérations très rapidement, un produit appelé « Google Quick Search Box »; et elle vendrait de la publicité.
Brin et Page se avaient signé leur tout premier accord de licence avec une société appelée Red Hat, une entreprise de logiciels qui distribuait une version du système d’exploitation libre Linux. Google avait obtenu autour de $20’000.
[Page 78]

Mais la publicité était loin d’être évidente…

Mais ils ne savaient pas ce qu’une annonce Google devrait être. Certains à Google, y compris le directeur de la technologie, Craig Silverstein, pensait que tout cet effort était une distraction et que Google devrait externaliser son système de publicité à une compagnie plus habitués à se vautrer dans la boue, tel Mammon. «Je me suis dit, ‘Nous ne sommes pas une société de publicité, nous sommes une société de recherche – laissons quelqu’un d’autre s’occuper de la publicité’,» dit Silverstein. « C’est une bonne chose qu’ils n’aient pas suivi mon conseil. » [Page 78]

Susan Wojcicki a admis plus tard le vrai problème: « Personne ne cliquait sur les annonces. » Mais elle a estimé que l’expérience a été un grand succès. « Il était incroyable que nous allions construire un système d’annonce de nous même. Quoi, nous n’avions pas assez à faire avec la recherche? Maintenant, nous demandions à nos ingénieurs, « Pouvez-vous développer des réponses sous la seconde dans toutes les langues pour chaque mot clé spécifique? » Il était impressionnant qu’ils l’aient effectivement fait. »
Un groupe peu impressionné à ce point était les investisseurs de Google. Au moment du deal avec Amazonie explosait en Janvier 2001, on en était à presque deux ans après l’investissement de 25 millions de dollars, et la compagnie essayait encore de gagner de l’argent avec les 70 millions de recherches quotidiennes sur son site. Un des business angels, David Cheriton, plaisantait à des amis que tout ce qu’il avait obtenu de son investissement à six chiffres dans Google avait été un T-shirt, le « T-shirt le plus cher du monde. » Pour les financiers du conseil d’administration de Google, le problème n’était pas matière à plaisanter.
[Page 79]

Donc, ils ont embauché un PDG à temps plein parce que les fondateurs avaient besoin de la « supervision d’un adulte ».

Dès le début, Schmidt a adopté une position publique envers les fondateurs faite d’admiration sans limites, une attitude qu’il a soigneusement entretenue par la suite. « J’a compris assez rapidement que ces jeunes gens étaient bons dans ce qu’ils faisaient», m’a-t-il dit au début 2002. « Sergey est l’âme et la conscience de l’entreprise. C’est un showman qui se soucie profondément de la culture, celui qui parle plus, avec un peu de Johnny Carson. Larry est le génial inventeur, un Edison. Chaque jour, je me félicite d’avoir accepté cet emploi ».
Ses anecdotes sur les désaccords avec Sergey et Larry ont suivi un scénario similaire : Schmidt exprimait un préjugé lié à la tradition. Les jeunes gens qui, techniquement du moins, lui reportent, rejettent l’idée et demandent que Google poursuive une alternative audacieuse, apparemment absurde. Le résultat? « Et bien sûr, ils avaient raison, » dirait Schmidt. Ce qui semblait fou était en fait une évaluation judicieuse de la manière dont fonctionnaient les choses dans la nouvelle économie basée sur l’Internet! […]
Cette déférence se révélera une stratégie gagnante, même si, pendant d’années, il y avait eu de sérieux problèmes d’ajustement, parce que les fondateurs pensaient clairement qu’ils se seraient très bien débrouillés tout seuls. Kordestani se souvient que au moment de l’arrivée de Schmidt, les deux fondateurs lui avaient exprimé leur inquiétude. En apparence, la question concernait les titres de chacun des fondateurs pour décrire leur rôle respectif. A niveau plus profond, Sergey était troublé, dit Kordestani, parce qu’il « avait embauché son propre patron, en quelque sorte, en sachant qu’il voulait être le patron. » Brin a pris le titre président de la technologie.
Larry était encore plus troublé. Kordestani dur rassurer Page qu’il était toujours essentiel et Google serait un échec sans lui. Kordestani lui rappela également qu’il n’aurait plus à effectuer des tâches auxquelles qu’il ne prenait aucun plaisir, comme les relations avec Wall Street et parler aux clients. Page finit pas se nommer président des produits.
Et même en 2002, les fondateurs exprimaient encore de l’amertume en expliquant pourquoi Schmidt avait été embauché. « Fondamentalement, nous avions besoin de la supervision d’un adulte », a déclaré Brin, ajoutant que leurs investisseurs en capital-risque « se sentent plus à l’aise avec nous maintenant – Qu’est-ce que deux hooligans allaient faire avec leurs millions? » La transition fut ardue, mais comme les années passaient, Page et Brin ont semblé véritablement apprécier la contribution de Schmidt. Page en viendrait à décrire l’embauche du PDG comme « brillante ».
[Page 81]

En effet trois modèles publicitaires

Mais le mépris pour la publicité traditionnelle imprégnait Google de haut en bas. Dans leur document académique original sur Google, Page et Brin avaient consacré une annexe aux maux de la publicité conventionnelle. Les fondateurs ne sont pas sûrs de ce que leurs annonces seraient mais ils étaient catégoriques qu’elles soient différentes. […] Néanmoins, les publicités de débuts de Google étaeint traditionnelles dans un aspect clé: l’annonceur était facturé en fonction du nombre de consultations. Ce modèle de CPM (coût pour mille) était la base de presque tous les marchés publicitaires. […] Alors que Google devrait faire la plupart de son argent de licences, selon Armstrong, la publicité pourrait un compte jours représenter jusque 10 à 15 pour cent de son chiffre d’affaires. [Page 84]

Enfin Google a créé AdWords et AdSense en plus du classique AdWords Premium. Et surprise, surprise …

Le défi le plus risqué consistait à convaincre des clients sceptiques et utilisateurs du AdWords originaux de quitter un système dont ils étaient heureux pour ce nouveau produit complexe. Le 24 Janvier 2002, le test effectué par Google AdWords en le proposant à des aux annonceurs sélectionnés. […] A partir de là, les publicités sur la droite de la page des résultats de recherche, qui n’avaient constitué que seulement 10 à 15 pour cent de la part de Google, avec la majeure partie provenant de la vente directe de GoogleAds se mirent à augmenter. […] En tout cas, Google récolta le fruit de son travail, et 2002 fut sa première année rentable. « Ce fut vraiment satisfaisant, » déclara Brin à l’époque. « Honnêtement, quand nous étions encore dans le boom dot-com, je me sentais comme un nul. J’avais eu une start-up Internet comme tout le monde. Elle n’était pas rentable, comme tout le monde, et c’est dur. Mais lorsque nous sommes devenus rentables, je sentis que nous avions construit une véritable entreprise « .
Le meilleur de tout est que Google, contre toute attente, faisait du profit sans renoncer à ses idéaux. « Savez-vous ce qu’était la réaction la plus commune, honnêtement? » demanda Brin. « C’était « quelles publicités? » Soit les gens ne faisaient pas de recherche qui généraient des publicités ou ne les remarquaient pas. Ou la troisième possibilité est qu’ils avaient des publicités et ne les remarquaient pas et ils les ont oubliées, ce qui je pense le scénario le plus probable ».
[…] Page dit en 2002. « Chaque mois, nous faisions plus d’argent que le précédent. » Le seul léger regret? Ils ne sont jamais devenus docteurs.
« Je le voulais, » a déclaré Sergey.
« Peut-être un jour, » a déclaré Larry.
« Ma mère ne cesse de me le demander, » a déclaré Sergey.
Larry fronça les sourcils. « Ma mère ne me le demande plus. »

[Pages 93-94]

Pourtant une publicité automatique peut être risquée …

Le seul hic dans le programme était le risque que les annonces Google sur un site Internet seraient inappropriées, voire offensantes. Quand les êtres humains crééent une annonce pour une publication, ils ont pris soin d’éviter les situations où la combinaison d’une certaine annonce avec un certain type d’article produirait un mauvais goût qui choquerait les lecteurs et serait perdant pour les annonceurs. Les algorithmes de Google ne sont pas si sensibles. « Les éditeurs flippaient», dit Liebman. Certains des associations involontairement blessantes sont devenues des classiques. Liebman cite une annonce qui racontait une histoire d’assassinat sanglant dans le New York Post: quelqu’un avait coupé un corps et l’avait mis dans un sac poubelle. Parallèlement à ce texte macabre était une annonce de Google pour les sacs plastique. « Nous n’avions pas prévu que il y aurait des moments où vous ne voulez pas caler des annonces sur le contenu », explique Georges Harik. « Nous avions analysé une page sur un accident d’avion et malheureusement placé une annonce pour les billets d’avion. Je pense que nous avons découvert rapidement que cela était une mauvaise idée. » Les ingénieurs de Google ont commencé à travailler sur les moyens d’atténuer ce problème, mais il ne sera jamais totalement éliminé. Il était tout simplement trop dur pour un algorithme formé à découvrir des correspondances entre les articles et annonces à faire preuve de bon goût humain. En 2008, une histoire sur les attentats de Bombay titrait « Les terroristes tuent l’homme qui leur a donné de l’eau » et a été accompagnée par l’annonce « Le terrorisme: obtenez un certificat en terrorisme 100% en ligne. Inscrivez-vous aujourd’hui. Ads by Google. » Un article sur l’intoxication alimentaire massive dans un restaurant Olive Garden à Los Angeles a été accompagnée par un coupon offrant un « dîner gratuit pour deux personnes au Olive Garden ». [Page 105]

Une entreprise vraiment étonnante …

Quand quelqu’un cliquait sur une annonce AdSense, l’argent payé par l’annonceur était partagé entre Google et l’éditeur dont le site hébergeait l’annonce. Selon Rajaram, l’idée originale était de diviser l’argent en deux – Google prendrait la moitié et l’éditeur AdSense prendrait l’autre moitié. Mais Brin pensait qu’une telle répartition donnait trop à Google. L’idée était de construire le programme sur le long terme, et si Google avait clairement indiqué qu’il prenait la moitié de l’argent, un concurrent pourrait saper le programme en donnant 80 ou même 90 pour cent de la part à l’éditeur. Donc, Google avait décidé de donner à la majorité de l’argent à l’éditeur. Puis Susan Wojcicki est venue avec une idée que certains pourraient trouver étrange : et si nous ne révélions pas le pourcentage de recettes pour l’éditeur? De cette façon, Google ne n’aurai pas à se soucier d’un concurrent proposant une meilleure répartition. [Page 106] Ce qu’ils firent.

« C’était l’un des plus choses les douloureuses pour moi », dit Rajaram. « A chaque table ronde à laquelle je participais pendant la première année, je j’avais droit à des questions sur les raisons pour lesquelles Google ne déclarait pas ce qu’était le partage des revenus et cette absence de transparence. Les gens disaient que nous le faisions parce que nous n’étions pas généreux. Mais bien au contraire, nous avons été généreux. Nous ne voulions pas que nos concurrents disent aux éditeurs qu’ils offraient un meilleur partage des revenus. » (En mai 2010, Google a finalement révélé la répartition. « Dans l’esprit dune plus grande transparence, » Google a indiqué que de l’argent reçu par les annonceurs sur AdSense pour le contenu, 68 pour cent allait aux éditeurs dont les pages accueilli les annonces. Google gardait les 32 pour cent restants. C’était proche des hypothèses que les participants et les analystes faisaient depuis longtemps. L’annonce tardive de Google ne fit que soulever plus de questions sur les raisons pour lesquelles cela avait été un secret en premier lieu.) [Page 106]

Plus tard dans l’année, AdSense a franchi l’étape de générer 1 millions de dollars par jour. […] Alors que AdSense était un grand succès, l’essentiel des revenus de Google venait d’AdWords. Le AdWords Select, à base d’enchères, de Salar Kamangar et Eric Veach avait d’abord été pensé comme un supplément aux annonces basées sur les impressions plus traditionnelles du programme qui est maintenant appelée AdWords Premium. Mais il fonctionnait si bien que Google se permettait parfois de placer ses annonces de vente aux enchères hors de leur ghetto de la colonne de droite pour passer directement dans la zone Premium au dessus des résultats de recherche. Si Google estimait que le résultat serait d’augmenter les recettes, une annonce Select annonce siphonnerait une annonce Premium et l’évacuerait de sa position si convoitée. Comme de plus en plus d’annonces de vente aux enchères déplaçaient les annonces premium vendues manuellement, Kamangar fit valoir que Google devrait entièrement mettre fin à la pratique de la vente de publicités Premium par une force de vente qui établissaient les prix et chargaient par impression. Il mit en place un projet, au nom de code D4, pour mettre en œuvre l’idée. La plupart des Googlers appela la formule le Premium Sunset. […] Eric Veach éatit convaincu que les faits montraient que la base d’enchères, incluant le pay-per-click était effectivement meilleure pour tout le monde. La clé est la qualité de l’annonce, ce qui fait en sorte que les annonces seraient placés devant des yeux sympathisant. Il fit une analyse approfondie et conclut que les annonces acheté via AdWords faisaient mieux. Il découvrit également des preuves tangibles que certains annonceurs Premium payaient trop peu pour certains mots clés précieux. […] Néanmoins, le changement serait douloureux. Cela signifiait abandonner des campagnes qui se vendaient pour des centaines de milliers de dollars, le tout pour la possibilité non prouvée que le processus de vente aux enchères devrait générer des sommes encore plus importantes. « Nous faisions de 300 millions de dollars dans les annonces au CPM et maintenant on allait nous tourner vers cet autre modèle et cannibaliser nos recettes. » [Page 110]

Et voici l’histoire de la croissance de Google …
Google growth 1998-2015

Google in the Plex – Partie 1: une technologie …

In the Plex est un (autre) livre étonnant à propos de mon entreprise préférée. Google est la raison pour laquelle j’ai écrit un livre sur les start-up : après avoir préparé une présentation PowerPoint en 2006 sur ce que je savais de la start-up de Mountain View, des amis me conseillèrent d’écrire un livre plus général sur les start-up. Ce que je fis en 2007. D’où ce blog!

J’ai déjà lu trois livres sur Google et celui-ci est aussi bon que les précédents. Peut-être meilleur. Je dois donc remercier ici Michele Catasta, qui m’a conseillé de le lire alors que je venais de faire une nouvelle présentation à peine mise à jour de celle de 2006. Et je l’aurais certainement lire avant de ce livre publié en 2011 … J’ai également posté de nombreux articles sur cette entreprise d’exception, il suffit de cliquer sur le tag Google. Mais j’ai appris beaucoup de choses dans le livre In the Plex, et c’est ce sur quoi je veux mettre l’accent avec cette nouvelle série. Et tout d’abord la technologie dont il est question dans le chapitre 1.

in-the-plex-home

Google n’a pas été la seule à inventer sa méthode de recherche

Larry Page n’ était pas la seule personne à comprendre en 1996 que l’exploitation de la structure des liens du web conduirait à une façon radicalement plus puissante de trouver des informations. Durant l’été de cette année-là, un jeune informaticien nommé Jon Kleinberg arriva en Californie pour postdoc d’un an au centre de recherche d’IBM à Almaden, à la limite sud de San Jose. Avec son récent doctorat du MIT, il avait déjà accepté un emploi dans le département d’informatique de l’Université Cornell. […] Kleinberg a commencé à jouer avec des moyens d’analyser les liens. Mais il ne disposa pas de l’aide, des ressources, du temps, ou de l’inclination nécessaires à indexer l’ensemble du Web pour son analyse des liens. […] Toutes sortes vice-présidents d’IBM s’attroupèrent à Almaden pour regarder des démonstrations de cette drôle de chose et essayer de réfléchir à ce qu’ils pourraient faire avec elle. « En fin de compte, la réponse fut … pas grand-chose. » […] Kleinberg garda des liens avec Google. Il déclina toutefois des offres d’emploi en 1999 et de nouveau en 2000. Il était heureux à l’Université Cornell. Il gagnerait des prix d’enseignement et une bourse MacArthur. Il a mené sa vie dans le milieu universitaire qu’il a choisi, et ne pas devenir un milliardaire ne semble pas l’avoir dérangé. [Pages 24-26]

Il y avait une troisième personne avec la même idée, un ingénieur chinois nommé Yanhong (Robin) Li. […] Li est venu aux États-Unis en 1991 pour obtenir un diplôme de maîtrise à SUNY Buffalo, et en 1994, a pris un emploi chez IDD à Scotch Plains, New Jersey, une division de Dow Jones. […] Il se rendit compte que le principe du Science Citation Index pourrait être appliqué à l’Internet. Le lien hypertexte peut être considéré comme une citation! « Quand je suis rentré, j’ai commencé à écrire cela et réalisé que c’était révolutionnaire », dit-il. Il conçut une méthode de recherche qui calcule la pertinence à la fois de la fréquence des liens et du contenu du texte. Il appela son système RankDev. […] Robin Li a quitta IDD vers la côte Ouest et la start-up InfoSeek. En 1999, Disney a acheté la compagnie et, peu après Li est retourné en Chine. C’est là à Pékin qu’il rencontrera plus tard – et rivalisera avec – Larry Page et Sergey Brin. [Pages 26-27] (Robin Li est le fondateur de Baidu)

La technologie a finalement été la meilleure, mais personne n’en a vraiment vu la valeur au début

Excite achèterait BackRub, puis Larry seul irait y travailler. L’adoption de la technologie BackRub par Ecite, selon lui, devrait augmenter son trafic de 10 pour cent. En extrapolant, en termes de recettes publicitaires, Excite gagnerait 130’000$ de plus chaque jour, pour un total de 47 millions en un an. Page envisageait un mandat chez Excite de sept mois, assez longtemps pour aider l’entreprise à mettre en œuvre le moteur de recherche. Il l’aurait quitté à temps pour le trimestre d’automne 1997 de Stanford pour reprendre sa progression vers un doctorat. Le coût total pour Excite serait de 1,6 million de dollars, dont 300’000$ à Stanford pour la licence, un salaire de 200’000 $, un bonus de 400’000$ pour la mise en œuvre dans les trois mois, et 700’000$ en actions Excite. […] « Avec mon aide», écrit l’étudiant qui n’avait pas encore vingt-quatre ans, « cette technologie donnera à Excite un avantage substantiel et la propulsera à la position de leader sur le marché. » Khosla fit une contre-offre provisoire de $ 750’000 au total. Mais l’affaire n’a jamais eu lieu. [Page 29]

En à peine un an, depuis que Page et Brin avaient formé leur entreprise, ils réunirent un groupe de scientifiques de haut niveau totalement engagés dans la vision de leurs jeunes fondateurs. Ces premiers employés feraient partie d’une équipe qui innovation après innovation agrandirait l’avance de Google sur ses concurrents et établirait son nom comme synonyme de recherche. […] Le processus durait au début dix jours avec l’un des premiers ingénieurs de Google, Harry Cheung (tout le monde l’appelait Spider-Man), à ses machines, suivant le progrès des « araignées » qui se propagent à travers le net et puis, après cette phase, brisant les pages Web pour l’indexage et le calcul du page rank, en utilisant le système compliqué de Sergey, processus mathématique utilisant quelque chose appelé vecteurs propres, alors que tout le monde attendait que les deux processus convergent. (« Les professeurs de mathématiques nous aiment parce que Google a rendu les vecteurs propres pertinents pour chaque étudiant en algèbre matricielle en Amérique », dit Marissa Mayer.) [Page 41]

Une technologie mais pas une science … et peut-être une technologie dangereuse

Dans ses premières années, Google a développé un certain nombre de formes spécialisées de recherche, connus sous le nom verticaux, pour divers corpus-comme la vidéo, les images, les catalogues commerciaux, et les emplacements (cartes). Krishna Bharat avait créé un de ces marchés verticaux appelé Google News, un service d’information virtuel avec une Une déterminée non par les éditeurs mais par des algorithmes. Un autre produit vertical, appelé Google Scholar, utilisait les revues universitaires. Mais pour accéder à ces marchés verticaux, les utilisateurs devaient choisir le vertical. Page et Brin ont poussé pour un système où l’on rechercherait et trouverait Tout. [Quelque chose appelé Universal Search]. [Page 58]

Lorsque l’équipe de Universal Search a montré un prototype aux cadres dirigeants de Google, tout le monde a réalisé que le lancement du projet […] en avait valu la peine. Les résultats de cette expérience au début étaient tous dans le mauvais ordre, mais la réaction a été viscérale – vous tapiez un mot sur le clavier, et toutes ces choses émergeaient. Cela n’était tout simplement jamais arrivé auparavant. « C’était certainement l’une des projets les plus risqués », dit Bailey. « Il était difficile, car ce n’est pas que de la science – cela fait aussi appel au jugement. Nous utilisons aussi dans une certaine mesure nos tripes. Je me lève toujours le matin en étant étonné que tout cela fonctionne. » La recherche de Google ne consistait plus à juste rechercher le web. Google était à la recherche de tout. Dans son livre de 1991, Mirror Worlds, l’informaticien de Yale, David Gelernter, a esquissé un avenir où les humains interagissent et échangent avec des représentations numériques modélisées du monde réel. […] Même si Gelernter envisagea avec enthousiasme cette perspective globale des mondes miroirs, il la craignait ainsi. « Je me sens vraiment partagé sur le sujet des mondes miroirs. Il y a des risques évidents de surveillance, mais je pense qu’il y a des risques plus profonds », at-il dit. Sa principale préoccupation était que les mondes miroirs seraient pilotés par des entreprises de geek qui les ont construits, par opposition au public. « Ces risques doivent être confrontés par la société au sens large, et non par les techno-geeks, » at-il ajouté. «Je ne leur fais pas confiance. Ils ne sont pas larges d’esprit et ne savent pas assez. Ils ne savent pas assez d’histoire, ils n’ont pas assez de bagage. [Page 59-60]

Les chercheurs de Google seraient d’accord pour reconnaître que travailler avec un système d’apprentissage de cette taille les a mis dans un territoire inexploré. L’amélioration constante de son système d’apprentissage a flirté avec les conséquences postulées par le scientifique et philosophe Raymond Kurzweil, qui spéculé sur une «singularité» imminente qui viendrait le jour où un système informatique massif évolue sur son chemin vers l’intelligence. Larry Page était une adepte enthousiaste de Kurzweil et un partisan de la Singularity University, une entreprise éducative inspirée de Kurzweil et qui anticipe le jour où les humains vont passer le relais de la conscience à notre descendance inorganique. [Page engagerait Kurzweil en 2012] Qu’est-ce que cela signifie de dire que Google « sait » quelque chose? […] « Voilà une question très profonde», dit Spector. « Les êtres humains, vraiment, sont de grands sacs faits principalement d’eau qui se promènent avec un grand nombre de tubes et quelques neurones. Mais nous savons. Alors maintenant examinons le système Google, ce cluster de calcul. C’est un ensemble de plusieurs heuristiques, il sait que «véhicule» est synonyme d’ «automobile», et il sait que en français, il y a voiture, et il sait ce qu’es le mot en allemand et dans chaque langue. Il sait ces choses. Et il sait beaucoup plus de choses qu’il a apprises de ce que chacun frappe sur le clavier. »[…] Spector ajouta que Google en apprendrait encore beaucoup, beaucoup plus dans les prochaines années. « Faire ces choses approche-il du niveau de la connaissance? » se demande-t-il rhétoriquement. «Mes enfants de dix ans le croient. Ils pensent que Google sait beaucoup de choses. Si vous demandez à n’importe qui dans leur classe à l’école, je pense que les enfants diraient oui. » Mais qu’est-ce que Spector, un scientifique, pense? « Je crains que ce ne soit pas une question qui se prête à une réponse scientifique, » dit-il. « Je ne pense, cependant, intuitivement, que Google sache. La question est : allons-nous construire une intelligence à des fins générales, qui se trouve juste là, regarde autour d’elle, puis développe toutes ces compétences en soi, peu importe ce qu’elles sont, que ce soit un diagnostic médical ou … »Spector fait une pause. « Nous en sommes loin, » dit-il. « Ce ne sera probablement pas fait durant ma carrière chez Google. » (Spector avait cinquante-cinq ans au moment de la conversation au début de 2010.) «Je pense que Larry aimerait beaucoup voir cela se produire », a-t-il ajouté. [Page 66-67]

Comme dernier commentaire lisez ce livre. Vous pouvez également jeter un œil à ma présentation Slideshare.

Elon Musk – le nouveau Steve Jobs – fou ou génie? (Partie 3)

Je viens de terminer la lecture de Elon Musk, et après mes deux posts précédents (partie 1 et partie 2), voici les notes complémentaires.

elonmusk-vance

Comment fonctionne l’innovation

C’est vraiment un livre fascinant et Elon Musk l’est tout autant. Un personnage vraiment unique et difficile. Et évidemment il est aussi très critiqué et détesté. Une de ces critiques sévères vient de la ​​Technology Review du MIT avec Tech’s Enduring Great-Man Myth par Amanda Schaffer. Vous devriez le lire. J’en extrais seulement deux phrases:
– « Pour le dire autrement, pensons-nous vraiment que si Jobs et Musk n’avaient jamais existé, il n’y aurait pas eu de révolution du smartphone, pas de regain d’intérêt pour les véhicules électriques? » Eh bien, cela est une question cruciale sur la source de l’innovation. La société ou les individus. La question est pertinente pour la science aussi.
– « C’est précisément parce que nous admirons Musk et pensons que ses contributions sont importantes que nous avons besoin de savoir à qui il doit son succès. » C’est une citation de Mariana Mazzucato que j’ai souvent mentionnée ici. Son livre The Entrepreneurial State est à lire absolument. Il y est question du rôle du gouvernement en matière d’innovation. Ma conviction de plus forte avec les années est que le gouvernement rend les choses possibles (science, technologie et invention, innovation), mais sans des individus d’exception – souvent des génies, parfois à la frontière de la folie – je ne crois pas que autant se passerait.

Maintenant, permettez-moi de citer encore Ashley Vance parce que les derniers chapitres du livres sont aussi passionnants que les premiers. Ces citations montrent que, malgré l’importance du gouvernement, il ne suffit pas à expliquer comment fonctionne l’innovation.

Alors que Tesla devenait une star de l’industrie américaine moderne, ses plus proches rivaux disparaissaient les uns après les autres. Fisker Automotive a fait faillite et a été acheté par une société chinoise de pièces d’automobiles en 2014. Un de ses principaux investisseurs était Ray Lane, un capital-risqueur chez Kleiner Perkins Caufield & Byers. Lane a coûté à Kleiner Perkins une chance d’investir dans Tesla et a alors soutenu Fisker – un choix désastreux qui a terni l’image de l’entreprise et la réputation de Lane. Better Place est une autre start-up qui a eu une plus grande aura encore que Fisker et Tesla mis ensemble et qui a recueilli près de un milliard de dollars pour construire des voitures électriques et des stations d’échange de batteries. La société n’a jamais vraiment rien produit et a déclaré sa faillite en 2013.
Les personnes comme Straubel qui avaient été chez Tesla depuis le début sont prompts à rappeler que la possibilité de construire une voiture électrique impressionnante a toujours existé. « Ce n’est pas vraiment comme s’il y avait une ruée vers cette idée, et nous y sommes arrivés en premier, » dit Straubel. « On oublie souvent avec le recul que les gens pensaient que c’était l’idée business la plus merdique de la planète. Les capital-risqueurs fuyaient tous en courant. » Ce qui séparait Tesla de la concurrence était la volonté de foncer vers cette vision sans compromis, avec un engagement complet à exécuter selon les normes de Musk.

[Pages 315-16]

Pendant toute la période de croissance de SolarCity, la Silicon Valley a déversé d’énormes quantités d’argent dans des entreprises de technologie verte avec des résultats souvent désastreux. Il y a eu les bourdes dans l’automobile comme Fisker et Better Place, et Solyndra, le fabricant de cellules solaires que les conservateurs aiment à considérer comme un récit édifiant des gaspillages du gouvernement et de clientélisme. Certains des plus célèbres capitaux-risqueurs dans l’histoire, comme John Doerr et Vinod Khosla, ont été attaqués par la presse locale et nationale pour l’échec de leurs investissements verts. L’histoire était presque toujours la même. Les gens avaient jeté l’argent dans les technologies vertes car cela semblait être la bonne chose à faire et non pas parce qu’il y avait une vraie opportunité. Des nouveaux types de stockage d’énergie aux voitures électriques et aux panneaux solaires, la technologie n’avait jamais été tout à fait à la hauteur du prix payé et demandait toujours trop de financement du gouvernement et d’incitations pour créer un marché viable. Une grande partie de cette critique était juste. Il y a juste qu’il y avait ce personnage, Elon Musk, qui semblait avoir compris quelque chose que tout le monde avait manqué. « Nous avions une règle générale de ne pas investir dans des sociétés de technologie propre pour environ une décennie, » a déclaré Peter Thiel, cofondateur de PayPal et capital-risqueur au Founders Fund. « Sur le plan macro, nous avons eu raison, car les technologies propres comme secteur ont été assez décevantes. Mais au niveau micro, il semble qu’Elon ait les deux sociétés de technologie clean-tech les plus prospères aux États-Unis. Nous préférerions expliquer son succès comme un coup de chance. Il y a toute cette histoire d’Iron Man dans laquelle il est présenté comme un homme d’affaires de dessin animé – cet animal de zoo très rare. Mais aujourd’hui, vous devez plutôt vous demander si son succès n’est pas un acte d’accusation contre le reste d’entre nous qui avons travaillé sur des choses beaucoup plus incrémentales. Dans la mesure où le monde doute encore d’Elon, je pense qu’il est une réflexion sur la folie du monde et non pas sur la folie supposée d’Elon. »
[Pages 320-21]

Tony Fadell à propos de Musk

Tony Fadell, l’ancien dirigeant d’Apple, crédité pour avoir mis l’iPod et l’iPhone sur le marché, a caractérisé le smartphone comme représentant d’un type de super-cycle dans lequel le matériel et les logiciels ont atteint un point critique de maturité. L’électronique est de qualité et peu chère, tandis que le logiciel est plus fiable et sophistiqué. […] Google a ses voitures sans conducteur et a acquis des dizaines d’entreprises de robotique car l’entreprise cherche à fusionner le code et la machine. […] Et une multitude de start-up ont commencé à intégrer dans les dispositifs médicaux du logiciel puissant pour aider les gens à surveiller et analyser leurs organes et diagnostiquer leur condition. […] Zee Aero, une start-up de Mountain View, compte quelques anciens employés de SpaceX et travaille à un nouveau type secret de transport. Une voiture volante enfin ? Peut-être. […] Pour Fadell, l’activité de Musk se trouve au sommet de cette tendance. « Que ce soit Tesla ou SpaceX, vous parlez de combiner le savoir-faire dans la fabrication et la production de l’ancien monde avec la technologie à faible coût des objets de grande consommation. Vous mettez ces choses ensemble, et elles se transforment en quelque chose que nous n’avons jamais vu auparavant. Tout à coup, vous avez un changement radical. C’est comme passer de zéro à un. »
[Pages 351-52] Cela ne vous rappelle pas le Zero to One de Peter Thiel.

Larry Page à propos de Musk

Google a investi plus que toute autre société de technologie dans les projets les plus fous de Musk: les voitures sans conducteur, des robots, et même un prix pour une machine qui ira sur la lune à bas prix. L’entreprise, cependant, fait face à un ensemble de contraintes et d’attentes qui son liées à l’emploi de dizaines de milliers de personnes et l’analyse constante des investisseurs. C’est dans cet esprit que Page se sent parfois un peu jaloux de Musk, qui a réussi à prendre des idées radicales comme base de ses entreprises. « Si vous pensez à la Silicon Valley ou aux chefs d’entreprise en général, ils ne manquent pas habituellement d’argent », dit Page. « Si vous avez tout cet argent, que vous allez sans doute donner et ne pourriez même pas tout dépenser même si vous le vouliez, alors pourquoi consacrez-vous votre temps à une entreprise qui ne fait pas vraiment quelque chose de bon ? Voilà pourquoi je trouve Elon un exemple inspirant. Il a dit: ‘Eh bien, que dois-je faire vraiment dans ce monde ? Résoudre les voitures, le réchauffement climatique, et rendre l’humanité multi-planétaire.’ Je veux dire que ce sont des objectifs assez convaincants, et il a maintenant les entreprises pour le faire. »
[Page 353]

Larry Page sur l’éducation

Ceci est un passage très intéressant [pages 355-56] indépendant de Musk: « Je ne pense pas que nous fassions un bon travail en tant que société à décider quelles choses sont vraiment importantes, » a dit Page. « Je ne trouve pas que nous éduquions les gens à réfléchir de cette façon générale. Vous devriez avoir une assez large formation scientifique et technologique. Vous devriez avoir une formation en leadership et un peu de formation de type MBA ou de connaissance sur la façon de gérer les choses, organiser les choses, et trouver de l’argent. Je ne pense pas que la plupart des gens le font, et c’est un gros problème. Les ingénieurs sont formés en général dans un cadre très rigide. Lorsque vous êtes en mesure de penser à toutes ces disciplines ensemble, vous commencez à penser différemment et vous pouvez rêver de choses beaucoup plus folles et comment elles pourraient fonctionner. Je pense que c’est vraiment une chose importante pour le monde. Voilà comment nous faisons des progrès. » [Pages 355-6]

Quelques derniers mots sur Musk

Il est presque drôle de constater que Musk passe tellement de temps à parler de la survie de l’homme, mais ne soit pas prêt à faire face aux conséquences de ce que son mode de vie fait de son corps. « Elon est arrivé à la conclusion au début de sa carrière que la vie est courte », a déclaré Straubel. « Si vous avez vraiment intégré cela, vous en arrivez à la conclusion évidente que vous devriez travailler aussi dur que vous le pouvez ». Souffrir a toujours été la chose de Musk. Les enfants à l’école l’ont torturé. Son père a joué avec lui à des jeux d’esprit brutaux. Musk a ensuite abusé d’un rythme de travail inhumain et et a toujours poussé ses entreprises aux limites. L’idée d’équilibre vie-travail semble vide de sens dans ce contexte. […] Il estime que la souffrance a contribué à faire de lui qui il est et lui a donné des réserves supplémentaires de force et de volonté. [Page 356]

Toutefois….

Comme l’a dit Thiel, Musk pourrait très bien être celui qui aura redonné de l’espoir aux gens et renouvelé leur foi dans ce que la technologie peut faire pour l’humanité. [Page 356]

Space Invaders à Paris et Toyko : une mise à jour.

Pas directement liée à mon activité principale sur ce blog, je publie de temps à autre sur le Street Art. L’été est un bon moment pour faire des synthèses et j’ai fait un peu de travail sur ma quête dse Space Invaders de Paris et Tokyo. Paris a maintenant 1167 invasions. Tokyo est toujours à 138 mais j’ai pu trouver quelques anciens en ligne.

3-SI

Voici également deux autres œuvres. Tout d’abord, mon artiste préféré, l’homme aux mosaïques miroirs de Pully en Suisse. Voiic une oeuvre qu’il a déposée à Paris.
IMG_6528

– Breaking Bad
1-breakingbad-s

– Cost
2-cost-s

Plus «sérieusement» voici quelques stats à propos de Paris (mise à jour en octobre 2015 avec 1182 invasions)
SI-PA-stats-oct2015

Donc, ma synthèse, que vous trouverez aussi sur SlideShare donne ceci:

Paris: de PA_1000 à …

Toyko