Les start-up en France

Je suis attaché à la France pour des raisons évidentes et récemment encore, j’ai lu plus encore que d’habitude sur l’innovation de mon pays. Elle n’est pas aussi mauvaise qu’on pourrait le croire, mais elle n’est pas aussi efficace que je le souhaiterais. Il y a pourtant de l’espoir comme le montre deux travaux récents:
– un article du journal Le Monde, intitulé Heureux comme un patron de start-up en France
– un rapport d’OSEO (l’Agence Française d’Innovation ) que j’avais déjà mentionné dans Il faut viser global tout de suite, mais que j’avais lu trop rapidement alors!

L’article du Monde traite de l’accélérateur Le Camping. L’article est optimiste (peut-être un peu trop), mais il mérite la lecture. J’y ai noté:

– « L’hexagone peut d’ailleurs compter sur des fonds expérimentés, comme Partech (mais aussi Idinvest, Apax) qui ont continué à irriguer le secteur après l’éclatement de la bulle Internet, en 2000. Une quinzaine de fonds de capital-risque financent environ un millier de start-up et injectent 200 à 300 millions d’euros par an dans le numérique, selon Philippe Collombel. L’industrie française est l’une des meilleures au monde, juge Christophe Bavière, le président d’Idinvest. Et de citer tous les domaines où un petit Frenchy est parvenu à se faire un nom aux côtés du leader anglo-saxon : Dailymotion face à YouTube, Viadeo derrière LinkedIn, Deezer sur les talons de Spotify… » A mon avis, la partie trop optimiste et ne somme nous là que pour faire des copies conformes des Etats-Unis?

– « Autre atout de l’Hexagone : ses serial entrepreneurs. La première génération a commencé avec le Minitel, s’est lancée dans le numérique à la fin des années 1990, et a surmonté la bulle. C’est celle des Marc Simoncini (iFrance, Meetic), Jacques-Antoine Granjon (Vente-privée), Patrick Robin (Imaginet, 24h00), Xavier Niel … Vingt ans plus tard, ils jouent les business angels auprès des plus jeunes : PriceMinister, Dailymotion, Criteo, ou Deezer… » Bien mieux et raison d’espérer en effet.

– « Certes, il y a des trous dans le canevas. Les business angels n’accompagnent pas encore assez les chefs d’entreprise, […] A l’autre bout de la chaîne, il manque des fonds pour passer du stade de start-up à celui d’entreprise de taille moyenne. » Trop vrai malheureusement.

Vous pouvez également être intéressé par une analyse de l’évolution des accélérateurs dans un article du Financial Times, Les Start-up mettent le pied sur l’accélérateur. « Dans le passé, ils auraient pu être étiqueté comme incubateur, ce qui est apparemment différent d’un accélérateur. » […] « Probablement le premier accélérateur est Y Combinator de Paul Graham dans la Silicon Valley. Depuis 2005, il a soutenu près de 500 start-up, y compris de grands succès tels que AirBnB et Dropbox. » […] « Cette méthode de construction de nouvelles entreprises à toute vitesse est fascinant. La philosophie est de soutenir beaucoup d’idées différentes, avec des échecs rapides, et de pivoter si quelque chose ne fonctionne pas. J’aime le sentiment d’urgence, l’éthique du travail, l’environnement à forte pression qui contribue aux développements rapides, et les incroyables possibilités de réseauter et de cross-fertiliser. » […] « Cependant, en général, je pense que les start-up prennent un certain temps pour devenir viables – des années et non pas des mois. Essayer d’obtenir autant dans une si courte période de temps ne me semble pas pas réaliste. » …] « Il y a maintenant quelques 123 programmes d’accélération dans le monde entier. » […] « Certains anciens pensent que beaucoup vont fermer, tout comme bon nombre des projets qu’ils incubent vont échouer. Mais toute cette activité frénétique va sûrement stimuler l’esprit d’entreprise, stimuler l’emploi et – dans le long terme – créer de la richesse, de sorte qu’elle mérite les applaudissements. »

Vous pouvez trouver le rapport OSEO en cliquant sur l’image. J’avais tort en écrivant mon post précédent, car j’ai découvert pas mal de choses en le relisant! Il ajoute en profondeur à l’excellent article du Monde. Par exemple sur les peurs et défis des entrepreneurs.


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La peur de l’échec avec ses stigmates reste la plus importante. Trouver des clients est le défi le plus grand, plus difficile que de trouver du financement. Enfin, il y a de jolies données sur l’âge des fondateurs, que l’on peut comparer un travail que j’ai fait sur 165 entreprises cotées en bourse.


Cliquer sur l’image pour l’agrandir. Source: données personnelles

C’est un sujet à la mode, qui fait parler et sur lequel je reste persuadé qu’un jeune âge compte. Vous pouvez lire par exemple les travaux de Vivek Wadhwa, son article du Washington Post ou encore L’âge des fondateurs. Je ne suis pas sûr des conclusions à tirer de tout cela, mais il semble y avoir un vieillissement des entrepreneurs… L’âge moyen des entrepreneurs français est 41 ans alors que celui des fondateurs de sociétés cotées en bourse que j’ai compilé est 36.5 (et même 34 ans pour celles fondées avant 1995).

Enfin il y a une intéressante analyse des « modèles de développement des start-up ».


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Les auteurs analysent en particulier 2 classes of start-up (sur 5 au total), les deux classes les plus fréquentes à savoir les classes 3 et 5 du graphique). [La classe 4 ressemble à un statut intermédiaire en route vers la 3 ou la 5.]

« Dans la classe 3, soit 41 % de la population totale, les entreprises ont un niveau de développement plus faible parce qu’autocentré :
• Elle regroupe au moins la moitié des CEI (créations d’entreprises innovantes) sans partenariat, sans filiale ou sans internationalisation (implantation à l’étranger ou exportation).
• Le porteur de projet y a encore une position capitalistique dominante : 68 % des porteurs de projet avec une part du capital supérieure à 75 % sont dans cette classe ; 1 sur 2 pour ceux qui ont encore 50 % à 75 % du capital. »

« A l’opposé, les entreprises de la classe 5, presque aussi nombreuses, ont un comportement d’ouverture avéré :
• Elles ont ouvert leur capital pour avoir les ressources financières suffisantes pour faire avancer leur projet d’innovation. 60 % des porteurs de projet avec une part au capital aujourd’hui inférieure à 25 % sont dans cette classe, de même que la moitié de ceux qui possèdent entre 25 % et 50 % du capital. Par ailleurs, la quasi-totalité des entreprises cotées est dans cette classe.
• 80 % de ces entreprises sont internationalisées (export ou implantation).
• Ce sont des entreprises qui ont eu le temps de se développer : près de la moitié est âgée d’au moins 8 ans et près de 40 % ont entre 5 et 8 ans aujourd’hui.
• Cette maturité n’explique, cependant, qu’en partie leur dynamique. En effet, elles ont été confrontées, elles aussi, à des problématiques de redéfinition de business plan de même nature que la classe 3, mais un peu plus fréquemment. Or, elles se positionnent comme moins contraintes que ces dernières. »

« Par ailleurs, la classe 3 concentre plus de CEI pour lesquelles l’accès aux financements publics et privés est considéré comme un levier principal de croissance. La jeunesse de cette population et sa faible ouverture du capital permet d’émettre l’hypothèse selon laquelle l’aide publique est, en pré-amorçage et amorçage, un substitut essentiel des capitaux privés. »

« Enfin, 4 porteurs de projet sur 10 qui n’ont aucune expérience de création d’entreprise sont dans la classe 3, contre seulement 3 sur 10 dans la classe 5. »

« La comparaison chiffrée des classes 3 à 5 sur ces mêmes variables révèle que :
• la CEI médiane de la classe 5 a un effectif supérieur à celle de la classe 4, qui emploie elle-même, plus de personnes que celle de la classe 3 (respectivement 10, 6 et 4 salariés) ;
• les classes 4 et 5 réalisent un chiffre d’affaires médian identique (environ 580 k€) bien plus élevé que celui de la CEI médiane de la classe 3 (390 k€) ;
• l’ordre logique est aussi respecté pour l’export : 44 % des CEI de la classe 5 sont exportatrices, 37 % pour la classe 4 et 25 % pour la classe 3. Le taux d’ouverture médian (CA/CA export) est de 37 % pour la classe 5, mais seulement de 25 % pour les classes 4 et 3 ;
• quant au niveau médian de fonds propres, il est encore nettement plus élevé pour la classe 5 (409 k€ contre 284 k€ pour la classe 4 et 149 k€ pour la classe 3 ; plus de 1 M€ pour le quartile supérieur de la classe 5, seulement 389 k€ pour celui de la classe 3) ;

Bien sûr la conclusion de ce rapport tend à encourager la sélection et le développement vers la classe 5. Ma conclusion un peu moins optimiste reste les chiffres relativement modestes de cette classe et un manque de succès de grande taille.

Un argumentaire contre les brevets

Grâce à des collègues Français avec qui j’échange sur le système d’innovation de mon pays, j’ai découvert Michele Boldrin et David K. Levine.

Leur Case Against Patents (document pdf ici) est un étrange ouvrage en raison des positions extrêmes de ses auteurs. je crois ourtant que ce document de 25 pages mérite une lecture attentive, mais si vous êtes pressés, en voici de longs extraits (avec mes commentaires en italique). J’ai déjà mentionné ici les problèmes que me posent les brevets comme dans La propriété intellectuelle à bout de souffle ? or Les brevets freinent l’innovation, supprimons-les ! (bien que ce titre ne soit pas de moi) ou encore Y a-t-il quelque chose de pourri au royaume du VC?. le sujet n’est donc pas nouveau pour moi.



[Page 1]
Il n’existe aucune preuve empirique que les brevets améliorent l’innovation et la productivité […] il y a des preuves solides, au contraire, que les brevets ont de nombreuses conséquences négatives.

[Page 2]
Il ne fait aucun doute que l’obtention d’un monopole comme une récompense pour l’innovateur augmente l’incitation à innover. Il ne fait non plus aucun doute que l’octroi d’un monopole pour une raison quelconque, a de nombreuses conséquences néfastes que nous associons au pouvoir d’un monopole – l’élément e plus important (et négligé) est l’incitation à s’engager dans une action politique pour préserver des rentes et étendre son monopole ou, pour ceux qui ne l’ont pas encore, pour essayer de l’obtenir.

À propos de la diffusion de l’innovation [pages 2-3]
Un deuxième avantage souvent cité des systèmes de brevets – mais pas tellement dans la littérature économique – serait la notion que les brevets sont un substitut au secret commercial (qui est lui socialement coûteux) et les brevets amélioreraient donc la communication des idées. […] Mais bien au contraire, les entreprises donnent en général des instructions à leurs ingénieurs d’éviter d’étudier des brevets existants afin d’être épargnées de demandes ultérieures de violation intentionnelle.

Ce que je peux confirmer avec la réponse suivante que j’ai eue il y a quelques années, lorsque j’explorais une possibilité licence de propriété intellectuelle à l’entreprise XXX: «Les avocats de XXX informent les employés de XXX de ne pas lire des demandes de brevet car cela pourrait empêcher ces employés d’explorer des idées dans des domaines proches. Si vous êtes intéressé par la vente de propriété intellectuelle, la seule fois où XXX a acheté de la propriété intellectuelle, c’est en acquérant une start-up développant cette propriété intellectuelle. »

À propos de la pharma [pages 4-5]
En général, le coût fixe de production d’un logiciel est faible – même si on estime que Apple a dépensé 150 millions de dollars pour le développement de l’iPhone. Ceci, cependant, n’est rien en comparaison du coût de développement de nouveaux médicaments – qui est estimé à près de 1 milliard de dollars – somme similaire à l’élaboration d’un nouveau modèle de voiture. Fait intéressant, il est vrai aussi que – à la fois selon des enquête et des preuves anecdotiques – les brevets jouent un rôle important dans la promotion de l’innovation dans l’industrie pharmaceutique tout en jouant un rôle mineur dans l’industrie automobile – dans la mesure où de nouveaux composants et même les usines sont souvent développés par des consortiums ou joint-ventures de producteurs, pourtant souvent concurrents forcenés, lorsqu’ils commercialisent différentes marques automobiles. La pertinence des brevets dans l’industrie pharmaceutique n’est probablement pas due aux coûts fixes élevés mais plutôt au fait que la divulgation dans le cas de médicaments est plus significative que dans celui des voitures et pour la plupart des autres produits [Le semiconducteur est un autre bon exemple]. La formule chimique et l’efficacité de la cure établie par des essais cliniques sont accessibles aux concurrents pour l’essentiel, quasi-gratuitement et c’est le second point qui représente environ 80% du coût fixe initial (de plus ces essais cliniques sont un bien public produit par le secteur privé en raison d’un choix politique.) […] Divers économistes, ayant des opinions différentes sur la propriété intellectuelle, ont cependant fait valoir que si l’intervention du gouvernement est en effet nécessaire dans ce marché, un système de prix serait de loin supérieur à l’actuel système de monopoles.

Sur les innovations matures et la PI [page 5]
Alors que l’industrie se développe, la demande se stabilise et devient beaucoup moins élastique; la possibilité de réduction des coûts des innovations diminue, les avantages d’un monopole croissent et le potentiel d’innovation est également réduit. Généralement, il y a un « shake-out » dans lequel de nombreuses entreprises quittent l’industrie ou sont rachetées. L’industrie automobile est un exemple classique de ce mouvement, mais plus récemment l’éclatement de la « bulle Internet » en est une meilleure illustration. A ce stade, la recherche de rente devient importante et les brevets sont largement utilisés pour inhiber l’innovation, empêcher les entrées et encourager les sorties.
[Page 11] De même, apparemment, les chercheurs en organisation de la plupart des pays industrialisés, essaient de comprendre pourquoi les brevets sont ignorés ou à peine utilisés dans les industries nouvelles et compétitives tout en étant très appréciés et sur-utilisés dans les domaines mûrs et très concentrés.
[Page 20] Dans les nouvelles industries comme la biotechnologie et les logiciels où l’innovation était en plein essor en l’absence de brevets, des brevets ont été mis en place. Compte tenu de cette extension continue, y a t-il eu une augmentation substantielle de l’innovation ces dernières années? Au contraire, il est évident que la récente explosion des brevets aux États-Unis, dans l’Union européenne et au Japon, n’a pas apporté quelque chose de comparable en termes d’innovations utiles et de productivité globale.

Ici aussi je note que ni le microprocesseur, ni l’internet ne furent brevetés; de plus quand l’internet fut ouvert à des applications commerciales ou quand le brevet du transistor fut licencié à de multiples acteurs (ce qui revenait presque à le mettre dans le domaine public), alors les innovations connexes se multiplièrent.

À propos des patent trolls et des NPE (entités non pratiquantes) [page 8]
Malgré le fait que les brevets sont principalement utilisés pour la course aux armements et que ceux-ci, à leur tour, sont développés par des patent trolls, il n’y a pas de modèles formels décrivant la manière dont cela peut inhiber une entrée inefficace. Dans la théorie de la course aux armements, si toutes les entreprises contrebalancent leurs portefeuilles de brevets et si toutes innovent, alors elles auraient innové aussi en l’absence de brevets – donc les brevets ne servent pas à encourager l’innovation. D’autre part, si (comme Microsoft ou d’autres patent trolls) vous n’avez pas un produit, vous ne pouvez pas être contre-attaqué, et donc vous pouvez utiliser les brevets pour partager les bénéfices sans faire le travail – en conséquence les brevets découragent l’innovation et sont un gaspillage pur et simple d’un point de vue social.

Le système des brevets est cassé, mais peut-il être réparé? [Pages 9-10]
Il y a peu de doute que pour les économistes un système de brevets bien conçu permettrait d’encourager l’innovation. Il est généralement admis que le système des brevets tel qu’il existe sert à encourager l’innovation, mais que le système des brevets tel qu’il existe est cassé […] Si un système de brevets bien conçu peut servir, pourquoi recommandons-nous de le supprimer? Pourquoi ne pas, au contraire, le réformer? Pour répondre à la question, nous devons étudier l’économie politique des brevets: pourquoi le système politique a-t-il conduit au système des brevets que nous avons? Notre argument est qu’il ne peut pas en être autrement. […] D’un côté, nous comprenons la défense traditionnelle de brevets idéaux comme prévue par un planificateur bienveillant mais, de l’autre, nous voyons que le droit des brevets est essentiellement conçu par des groupes d’intérêt désireux d’augmenter leurs rentes de monopole, et non pas le bien commun global.

Aucune incitation aux réformes [page 12]
Il y a beaucoup d’acteurs dans l’industrie des brevets, mais « les consommateurs » n’en font pas partie. Du côté des déposants potentiels, il y a les inventeurs individuels, les entreprises qui inventent et les patent trolls, qui n’inventent jamais rien mais n’en déposent pas moins. De l’autre côté se trouve les offices des brevets, les avocats qui déposent des brevets et plaident et enfin les tribunaux où les litiges sont réglés. Les règles du jeu sont établies – mais seulement en partie – par la puissance publique, et dans la mesure où les intérêts de la population en général sont concernés, ce sont ces acteurs qui les représentent. Comme le dépôt de brevet est un sujet technique dont peu d’électeurs-citoyens ont la moindre connaissance – et peu sont susceptibles d’avoir une connaissance détaillée des conséquences des systèmes de brevets – les intérêts des électeurs ne sont pas bien représentés du tout, au contraire des intérêts concurrents des autres acteurs. […] Il doit être clair, alors, que compte tenu de l’ensemble de ces acteurs et de leurs motivations, le marché des brevets ne peut avoir qu’un seul équilibre au fil du temps, qui est celui que nous avons observé. […] A chaque étape de ce processus d’élargissement, la principale force motrice a été les efforts de recherche de rente des grandes entreprises riches en liquidités mais incapables de faire face à de nouveaux concurrents créatifs. Avocats de brevets, employés des offices de brevets et patent trolls ne sont en fait que la chair à canon des grands groupes.

Abolition des brevets [page 20]
L’abolition des brevets ne peut sembler que « vœu pieux » et il y a certainement beaucoup de mesures provisoires qui peuvent être prises pour atténuer les dommages: interpréter correctement la non-évidence d’inventivité, exiger une véritable divulgation des méthodes et défendre l’invention indépendante contre la contrefaçon sont utiles et – parmi les économistes – considérées comme acceptées. Mais pourquoi utiliser un cautère sur une jambe de bois? Les économistes se sont battus pendant des décennies – et, finalement, avec beaucoup de succès – pour abolir les restrictions commerciales. Il n’échappera pas au lecteur attentif que les brevets sont très semblables aux restrictions commerciales, car elles empêchent la libre entrée des concurrents sur les marchés nationaux, ce qui réduit la croissance des capacités de production et ralentit la croissance économique. De la même manière que les restrictions commerciales ont été progressivement réduites jusqu’à atteindre une (presque complète) abolition, une approche semblable (quoique, je l’espère moins lente) devrait être adoptée pour «se débarrasser» des brevets. De plus, en raison de la nature des brevets limitée dans le temps, il est relativement facile de les éliminer par une mise en place progressive de durées de brevets de plus en plus courts. Cette approche prudente a aussi l’avantage que si la réduction de la durée des brevets a en effet un effet catastrophique sur le processus d’innovation, elle peut être facilement inversée.
[…]
Les brevets ne devraient être autorisés que lorsque le pouvoir de monopole est justifié par des preuves au sujet des coûts fixes et de l’absence réelle d’appropriabilité.
[…]
Les résultats de la recherche subventionnés par la puissance publique ne doit pas conduire à la création de nouveaux monopoles privés, mais devrait être disponible pour tous les participants du marché. Cette réforme serait particulièrement utile pour l’industrie pharmaceutique.

je n’ai pas (encore) lu leur Against Intellectual Monopoly mais je vais sans doute le lire étant donné la profondeur de leur analyse. Comme ils le disent eux-mêmes, tout ceci n’est peut-être que « vœu pieux », irréaliste et donc inutile, et je devine aussi une approche libertarienne derrière tout cela. Mais une fois encore, je crois que leurs arguments méritent que l’on s’y arrête plus longuement que la simple lecture de ce long résumé.

Deezer, la nouvelle success story française?

Je ne parle pas souvent de start-up françaises, mais après mon récent article sur Parrot, ce serait une erreur de ne pas mentionner la levée de fonds impressionnante de Deezer. Si vous ne connaissez pas service musical de Deezer, essayez-le!

Deezer a été lancé par deux jeunes entrepreneurs français (âgés de 28 et 32 ans à la date de création en 2007), leur premier investisseur fut Xavier Niel, le célèbre fondateur de Free, la start-up est soutenue par AGF Private Equity, DotCorp (la holding des fondateurs de Pixmania) ainsi que par Orange. Deezer a fait pas mal de bruit hier an annonçant un nouveau financement de Access Industries, le propriétaire de Warner Music. En France, il est possible d’obtenir des informations sur les actionnaires des entreprises même quand elles ne sont pas cotées en bourse et ceci grâce à Infogreffe, le registre du commerce français. Cela ne vous coûtera que quelques Euros. Donc… voici la table de capitalisation que j’ai pu construire à partir de ces informations. Sans doute aps 100% exacte, ainsi que je n’ai pas de chiffre pour le CEO ou le COO. Et il semble que Access va aussi acheter des actions aux actionnaires existants (ce qui pourrait expliquer les annonces d’un tour de €100M et non pas les €70M que j’ai trouvés).

Pas encore une success story, mais une histoire prometteuse!


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Deux livres sur le Business Planning

Une brève mention ici de ma revue (en anglais) de deux livres sur le « business planning » ou plutôt le « business discovering ».
Il s’agit de
Winning Opportunities de Raphael Cohen, dont l’article est Proven Tools for Converting Your Projects into Success (without a Business Plan) (publié le 25 septembre).

– de Getting to Plan B de Randy Komisar et John Mullins et la référence au post du blog, Getting to plan B (or to a Better Business Model) (publié le 3 octobre).

Le secret du capital-risque: 3 start-up sur 4 échouent

Dans un article récent du Wall Street Journal, il est affirmé que le capital-risque réussit beaucoup moins qu’on ne le pensait: 3 start-up sur 4 échouent. Eh bien, je suis surpris par la surprise. J’ai fait quelques copier-coller du papier ci-dessous, et j’ai mis en gras les choses que je trouve intéressantes. Vous devriez peut-être y faire un saut avant de revenir ici!

J’ai fait mes analyses dans le passé. Vous pouvez revenir à mon travail sur les quelques 2700 entreprises liées à Stanford (diapositive 9 du pdf) ou plus anecdotiquement au premier fonds de Kleiner Perkins .

Alors oui, il y a beaucoup d’échec dans le VC et les chiffres ne comptent pas tellement. Il se pourrait que, dans le passé, il y avait moins d’échecs que de nos jours, et les raisons seraient nombreuses, mais le point important dans cet article est le suivante: « la vérité est que si vous n’avez pas beaucoup d’échecs, vous ne faites tout simplement pas bien les choses, parce que cela signifie que vous n’investissez pas assez dans des entreprises risquées. »

Extraits de l’article du WSJ:

It looks so easy from the outside. An entrepreneur with a hot technology and venture-capital funding becomes a billionaire in his 20s. But now there is evidence that venture-backed start-ups fail at far higher numbers than the rate the industry usually cites. About three-quarters of venture-backed firms in the U.S. don’t return investors’ capital, according to recent research by Shikhar Ghosh, a senior lecturer at Harvard Business School. Compare that with the figures that venture capitalists toss around. The common rule of thumb is that of 10 start-ups, only three or four fail completely. Another three or four return the original investment, and one or two produce substantial returns. The National Venture Capital Association estimates that 25% to 30% of venture-backed businesses fail.

Mr. Ghosh chalks up the discrepancy in part to a dearth of in-depth research into failures. « We’re just getting more light on the entrepreneurial process, » he says. His findings are based on data from more than 2,000 companies that received venture funding, generally at least $1 million, from 2004 through 2010. He also combed the portfolios of VC firms and talked to people at start-ups, he says. The results were similar when he examined data for companies funded from 2000 to 2010, he says. Venture capitalists « bury their dead very quietly, » Mr. Ghosh says. « They emphasize the successes but they don’t talk about the failures at all. »

There are also different definitions of failure. If failure means liquidating all assets, with investors losing all their money, an estimated 30% to 40% of high potential U.S. start-ups fail, he says. If failure is defined as failing to see the projected return on investment—say, a specific revenue growth rate or date to break even on cash flow—then more than 95% of start-ups fail, based on Mr. Ghosh’s research.
Failure often is harder on entrepreneurs who lose money that they’ve borrowed on credit cards or from friends and relatives than it is on those who raised venture capital.

« People are embarrassed to talk about their failures, but the truth is that if you don’t have a lot of failures, then you’re just not doing it right, because that means that you’re not investing in risky ventures, » Mr. Cowan says. « I believe failure is an option for entrepreneurs and if you don’t believe that, then you can bang your head against the wall trying to make it work. »

Overall, nonventure-backed companies fail more often than venture-backed companies in the first four years of existence, typically because they don’t have the capital to keep going if the business model doesn’t work, Harvard’s Mr. Ghosh says. Venture-backed companies tend to fail following their fourth years—after investors stop injecting more capital, he says.

Of all companies, about 60% of start-ups survive to age three and roughly 35% survive to age 10, according to separate studies by the U.S. Bureau of Labor Statistics and the Ewing Marion Kauffman Foundation, a nonprofit that promotes U.S. entrepreneurship. Both studies counted only incorporated companies with employees. And companies that didn’t survive might have closed their doors for reasons other than failure, for example, getting acquired or the founders moving on to new projects. Languishing businesses were counted as survivors.

Of the 6,613 U.S.-based companies initially funded by venture capital between 2006 and 2011, 84% now are closely held and operating independently, 11% were acquired or made initial public offerings of stock and 4% went out of business, according to Dow Jones VentureSource. Less than 1% are currently in IPO registration.

—Vanessa O’Connell contributed to this article.
Write to Deborah Gage at deborah.gage@dowjones.com

Jeunes de France : Barrez-vous ! Ou Battez-vous !

Le débat fait rage depuis quelques jours. Vous l’avez sans doute découvert si vous suivez l’actualité française. Sinon, voici une occasion de le découvrir. Ce soir (ou jamais!) est une des meilleures émissions de télévision que je connaisse. Le mardi 11 septembre, les deux auteurs des chroniques Barrez-vous ! et Battez-vous ! étaient réunis. Le sujet commence à 34’45 sur le stream video.

Si vous avez lu Start-Up, je disais la même chose, à ma manière. Allez voir la Silicon Valley (« Go West! ») pour mieux revenir (comme du Bellay?) Il n’est pas question de défaitisme, peut-être d’individualisme (et non pas d’égoïsme) et surtout d’optimisme à la Voltaire. L’explication de Marquardt sur l’accusation de jeunisme (à 44’22) est intéressante. Un moment important du débat fut la rencontre, je veux dire l’accord, entre Félix Marquardt et Olivier Besancenot (49’50). C’est à ce moment-là que, je crois, s’exprima le meilleur de l’échange.

Et pour mémoire:

Jeunes de France, votre salut est ailleurs : barrez-vous !
3 septembre 2012
Par FÉLIX MARQUARDT Fondateur des Dîners de l’Atlantique et des Submerging Times Dinners , MOKLESS Rappeur, auteur interprète, membre du groupe Scred Connexion, MOULOUD ACHOUR Journaliste
Jeunes de France, ceci n’est pas une incitation à l’évasion fiscale mais à l’évasion tout court. Comme on dit au Maghreb et dans les quartiers les plus défavorisés de France, vos aînés vous prennent pour des ânes sans oreilles («khmar bla ouinedine»). Leurs beaux discours dissimulent de plus en plus maladroitement une vérité bien embarrassante : vous vivez dans une gérontocratie, ultracentralisée et sclérosée, qui chaque jour s’affaisse un peu plus.
Comment qualifier autrement, en 2012, une société où une élite de quelques milliers de personnes, dont la moyenne d’âge oscille autour de 60 ans, décide d’à peu près tout ?
Comment qualifier autrement un système qui, depuis maintenant plus de trente ans, s’accommode du fait qu’un jeune sur quatre, quasiment, se trouve au chômage (dans bon nombre des quartiers évoqués plus avant, c’est même plutôt un sur deux) et dans lequel, de manière générale, on renâcle encore à confier des responsabilités d’encadrement à qui que ce soit de moins de 40 ans, voire de 50 ans ? Sachez-le. Une société qui traite sa jeunesse de pareille manière est une société en déclin. Droite ou gauche, politique de rigueur ou de relance, le seul enjeu de nos jours est de savoir si l’an prochain nous connaîtrons une croissance du PIB de 0,5% ou de 1% et si le taux de chômage sera en deçà ou bien au-dessus de 10% – et ces chiffres, déjà affligeants, s’aggraveront dans les années qui viennent, soyez-en sûrs.
Le roi est nu et la triste réalité est là : pour la première fois depuis bien longtemps dans cette partie du monde, une génération au moins – la vôtre – vivra, vous le pressentez d’ailleurs, moins bien que la précédente. N’en déplaise à certains, cette donnée fondamentale n’est pas le fruit d’un complot ourdi par les riches et les puissants de la planète, en proie qu’ils sont à des luttes de pouvoirs et d’ego qui les occupent bien assez entre eux.
Par-delà les chocs qui font tanguer le navire planétaire, un grand rééquilibrage est à l’œuvre : pour la première fois depuis cinq cents ans, des hommes blancs d’un certain âge, issus d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord, ne président plus seuls – ce sera de moins en moins le cas – aux destinées du monde. Il suffit de passer quelques jours, voire quelques minutes, à Istanbul, Djakarta, Mumbai ou São Paulo pour en prendre conscience. Et quelques minutes de plus pour réaliser que ce n’est que justice. Et que, trop souvent, ceux qui prétendent défendre les intérêts des classes populaires en France le font sans une pensée pour les 3 milliards d’êtres humains qui vivent avec 2 dollars par jour ou moins… Ce qui, si le progressisme est encore un humanisme, est au mieux illogique, au pire rien de moins qu’immoral.
Grandissant dans la France des Trente Glorieuses, vos aînés ont connu un âge d’or. Aujourd’hui c’est au tour des Brésiliens, des Chinois, des Sénégalais et des Colombiens, chacun avec leurs problèmes et défis, bien évidemment, mais unis par cette foi en l’avenir qui caractérise les puissances en devenir.
Jeunes de France, barrez-vous, sinon pour vous du moins pour vos enfants . Votre salut est, littéralement, ailleurs. Non pas dans la fuite, en quittant un pays dont les perspectives économiques sont moroses, mais en vue de vous désaltérer et de vous réinventer pour revenir riches d’expériences nouvelles, imprégnés de la créativité et de l’enthousiasme qui fleurissent aujourd’hui aux quatre coins du monde, ayant fait les rencontres qui vous changeront avant que vous n’en fassiez profiter la France.
N’hésitez plus, choisissez une destination où le monde est en train de se faire, là, tout de suite, que ce soit Tbilissi – où la ministre de l’Economie, la patronne de la police nationale et le seul conseiller du Président sont tout juste trentenaires – Le Caire, Shanghai, Mexico ou Santiago… Barrez-vous parce que rien ne vaut l’ivresse qui vient avec la conscience du monde et de l’autre du voyageur : partir, c’est découvrir qu’on ne pense pas, ne travaille pas, ne communique pas de la même manière à Paris, à Guangzhou ou au Cap.
Barrez-vous, plus prosaïquement, pour améliorer votre niveau de vie. Car si vous ne gagnerez pas automatiquement plus d’argent en (re)démarrant votre carrière à l’étranger, la probabilité que votre niveau de vie s’accroisse sensiblement au bout de quelques années le cas échéant est statistiquement bien meilleure que si vous restez embourbé en France (ceci vaut d’ailleurs tant pour les apprentis restaurateurs, coiffeurs, chauffeurs que pour les banquiers).
Partez, revenez, repartez encore, revenez de nouveau. Une vertu centrale de vos pérégrinations sera d’enfin réconcilier la France, forte de vos lumières, avec la réalité du monde qui nous entoure. Trop souvent encore, notre pays fonctionne en effet en vase clos, la topographie du débat public y relevant d’une curieuse forme de schizophrénie où les grands bouleversements planétaires ne donnent lieu qu’à de petits débats gaulois. Le gouffre de plus en plus béant entre la situation réelle de la France et les propositions de ses dirigeants ne sera pas comblé par d’autres que vous, qui, à force de voyages, de rencontres et de découvertes, pourrez sortir ce pays de l’abrutissement engendré par l’autarcie intellectuelle qui est la sienne depuis une trentaine d’années au bas mot.
Jeunes de l’Hexagone, ce n’est pas uniquement votre pays de naissance qui est vôtre mais le monde tout entier. Faites-vous violence si nécessaire mais emparez-vous-en. Il y va de votre avenir. Et de celui de la France.
www.barrez-vo.us

et la réponse:

Jeunes de France, battez-vous !
9 septembre 2012 à 19:07
Par FRANÇOIS-XAVIER BELLAMY 26 ans. Normalien, agrégé de philosophie, enseignant en zone urbaine sensible, puis en classes préparatoires littéraires. Maire adjoint (sans étiquette) de Versailles, délégué à la jeunesse et à l’enseignement supérieur.

C’est la rentrée ; en cette période où des millions de jeunes retrouvent le chemin des cours, l’actualité semble accumuler sur leur avenir des nuages plus noirs que jamais. C’est le moment qu’ont choisi trois auteurs pour signer, dans ces pages, une tribune au titre encourageant : «Jeunes de France, votre salut est ailleurs : barrez-vous !» (Libération du 4 septembre).
Ce texte est un passionnant mélange de toutes les pulsions qui habitent l’inconscient collectif de notre génération. La première d’entre toutes, un fatalisme à toute épreuve, qui proclame avec assurance l’inéluctable déclin de nos sociétés occidentales, en trouvant d’ailleurs des raisons de s’en réjouir : notre pauvreté future, et bien méritée, serait le corrélat nécessaire du développement du tiers-monde – comme si l’activité humaine, dépourvue de toute créativité, était un jeu à somme nulle…
La même passivité inspire un discours victimaire, qui nous présente comme des «ânes sans oreilles», maltraités par une gérontocratie qui nous abuse. Je ne nous pensais pas si bêtes ! Cette lamentation puérile converge avec un individualisme absolu, qui ne se reconnaît aucun héritage et aucun devoir, puisque nous sommes «du monde tout entier». Le propos aboutit donc à un résultat simple et logique : «Barrez-vous !». De deux choses l’une : soit nos auteurs ont voulu expliquer qu’il était bon d’aller voir ailleurs comment tourne le monde pour revenir plus intelligents. Voilà qui n’est pas bien nouveau ; il aurait suffi de rappeler que «les voyages forment la jeunesse», rien n’a changé de ce point de vue. Soit il faut prendre au sérieux leur argumentation, ce qu’ils semblent parfois ne pas oser faire eux-mêmes.
La France est en crise ; la croissance est ailleurs ; vous ne devez rien à personne : partez ! Alors, cette incitation à l’évasion apparaît brutalement dans sa prodigieuse lâcheté. Jeunes de France, notre pays va mal. Il est inutile de détailler les difficultés dans lesquelles il se trouve pris ; si nous ne les connaissons pas toutes, elles viendront à nous bien à temps.

« Il faut chérir l’entrepreneuriat » nous dit le chairman de Nokia.

Je n’ai pas vérifié combien de fois j’ai blogué sur la Finlande, mais il est certainement l’un des pays les plus intéressants pour l’entrepreneuriat high-tech en Europe. Pourtant, lorsque j’ai assisté à la conférence REE à l’Université d’Aalto la semaine dernière, j’ai été frappé par les propos de Risto Siilasmaa. Il n’est pas seulement le président du conseil d’administration du géant des téléphones mobiles, mais aussi le fondateur et le chairman de F-Secure, une start-up de logiciels de sécuité. Si vous avez le temps, regardez son discours en entier et écoutez attentivement. Voici mes notes, que j’espère fidèles. elles commencent par: « l’esprit d’entreprise devrait être célébré, car il sera crucial de l’avenir du monde. Ce n’est pas un métier, c’est un état d’esprit. »


(Aller sur youtube: http://youtu.be/nFyKRCo4QkM si vous ne voyez pas la vidéo insérée!)

«En 1924, la Finlande a obtenu 37 médailles dont 14 médailles d’or aux Jeux olympiques, mais beaucoup moins en 2012. La Finlande était pauvre, mais à cette époque, l’Europe représentait 25% de la population mondiale et 33% du PIB. En 2050, elle représentera 7% de la population et 15% du PIB. Et nous ne serons pas en mesure de donner à tous la richesse dont nous, les Européens, jouissons aujourd’hui. Ne parlons même pas du changement climatique et du vieillissement. Aujourd’hui, en Europe, sur 100 personnes, 46 travaillent, dont 8 dans le monde de la santé. En 2050, 38 travailleront dont 18 dans la santé. Moins de 20 créeront de la richesse pour les autres. L’équation ne fonctionne pas. Les subventions européennes vont pour 1/3 à l’extraction du charbon et à l’agriculture et 8% à la R&D et à la technologie. Ceci n’a aucun sens. Les Européens, les citoyens ont besoin d’élire des dirigeants qui ont une vision et du courage… l’esprit d’entreprise doit avoir un impact et il n’y a aucun intérêt à faire de petites innovations quand vous courez à l’échec. »

Risto a fondé F-Secure quand il avait 24 ans, mais a commencé à se faire de l’argent de poche quand il avait 12 ans. Il a étudié à Aalto, mais se souvient plus d’éléments négatifs que positifs quant à ses études. L’esprit d’entreprise n’était pas apprécié à sa juste valeur, les enseignants ne semblaient pas accorder de valeur de leur enseignement ou ne se préoccupaient pas de la qualité de la transmission. « C’était très décevant ». Il n’avait pas eu camarades de classe ayant un intérêt pour l’esprit d’entreprise, mais il doit remercier Aalto pour l’avoir poussé à créer une entreprise avec un ami quand il a commencé à faire des affaires. C’était un cabinet de conseil / de projets et il a engagé de nombreux anciens d’Aalto. Il se souvient aussi de «l’aversion pour le transfert de compétences pratiques» et une d’une attraction pour la théorie [quelque chose auquel il faut peut-être réfléchir – pourquoi ce fait?]. «Les sciences de la gestion étaient décevantes, le plus compliqué vous étiez, le meilleur (savez-vous ce que sont « déséconomies de compression du temps? »[Voir la prochaine ligne]). Un PDG ne va jamais lire de recherche en gestion, les chercheurs veulent simplement que leurs collègues chercheurs les lisent, ou pourquoi n’auraient-ils pas utiliser « délai d’exécution » ou quelque chose de semblable au lieu de la notion complexe citée plus haut? Siilasmaa considère qu’il pourrait y avoir des trésors cachés dans la recherche, mais comment le savoir.» «Encore une fois l’esprit d’entreprise est un état d’esprit, ce qui implique pragmatisme, ambition, rêves, persévérance, optimisme et capacité à renoncer et recommencer à nouveau. Il y a aussi désir de résultats. Nous devons nous réveiller, essayer, tuer ce qui échoue et recommencer.» Siilasmaa a aussi cité George Bernard Shaw: « Certains voient les choses comme elles sont et se demandent pourquoi. D’autres rêvent de choses qui n’ont jamais existé et disent pourquoi pas. »

Puis ce fut la séance de questions-réponses (Q/R):
– le tabou de l’argent. Oui, le nouveau président français a dit qu’il déteste les gens riches. L’argent est un sous-produit, mais le succès devrait être célébré. Une fois que vous en avez assez, vous n’avez pas besoin d’argent, mais c’est un résultat;
– les stock-options – Q: Sont-elles acceptées en Finlande comme dans la Silicon Valley? R: oui, mais les tours de financement successifs et l’absence de sorties font des stock-options un mécanisme moins réussi en Europe, pas moins accepté;
– les valeurs: elles doivent venir de parents, pas de l’école. Maintenant, il est vrai que certains dirigeants ont réussi avec des valeurs étranges, comme des « gourous de secte ». Pas facile de les blâmer quand ils ont du succès, mais comment pouvons nous nous aligner sur ces valeurs … pas facile;
– la recherche sur l’entrepreneuriat à nouveau: si un article n’est pas complexe, il n’est pas accepté pour publication, tant pis! Un PDG lira plus facilement des livres de 300 pages avec 1 seule idée, malheureusement! Alors vous avez besoin de sélectionner des enseignants avec des valeurs et de l’ambition. Pourquoi ne pas des entrepreneurs? Il ya un livre sur la manière de choisir les bonnes personnes. Cherchez le sur Google

La conférence a été riche en intervenants de qualité, mais rien de vraiment comparable à Siilasmaa. J’ai remarqué quelques bonnes choses comme «être entrepreneurs pour avoir un impact. Tout comme pour les scientifiques ou des artistes, il est question de laisser une trace dont l’on se souviendra. Par conséquent, nous devons «exposer autant de personnes que possible à l’esprit d’entreprise et espérer que la diversité va induire la richesse. Encore une fois il s’agit d’un processus darwinien. Et nous devrions aussi être conscients que l’entrepreneuriat n’est pas seulement la satisfaction des besoins, mais aussi la réponse à des frustrations et à des désirs.

J’ai été moins convaincu par le fait que la créativité peut être enseignée (mais je ne suis pas créatif alors peut-être que je devrais suivre ces cours!); j’ai surtout entendu parler des conditions de la créativité. Moins convaincu aussi par l’idée de John Mullins que les clients peuvent être préférables pour financer votre start-up aux investisseurs (ce n’est pas mon expérience mais je pourrais être biaisé) ou même que l’enseignement de l’entrepreneuriat peut remplacer l’état d’esprit. Mais il y eut une analyse intéressante que je reformule à ma façon: «Si 100 étudiants suivent un cours, 10 peut-être vont lancer une entreprise, 5 échoueront car ils n’ont pas écouté / appris, 4 survivront parce qu’ils ont appris les outils pour éviter les erreurs fatales, et 1 réussira parce qu’il n’aura pas entièrement écouté et aura fait son propre chemin différemment des leçons inculquées! »

Permettez-moi de terminer avec quelque chose de vaguement lié. Comme vous le savez peut-être si vous avez un visiteur régulier ici, j’aime publier les tables de capitalisation de start-ups (si les données sont disponible pour la créer, par exemple au moment d’une sortie); voici celle de F-secure.

Un quiz pour les nouveaux étudiants EPFL de 2012

J’ai une petite tradition de soumettre un quiz lié aux start-up chaque année aux nouveaux étudiants de l’EPFL. Le voici:

J’étais à Helsinki la semaine dernière, et là, le président de Nokia a fait un exposé. «Le monde est en crise et la solution à nos problèmes viendra des créateurs et entrepreneurs. […] C’est pourquoi l’esprit d’entreprise devrait être chéri, ce n’est pas un métier, c’est un état d’esprit. […] Encore une fois, c’est un état d’esprit. »

La 1ère mission de l’EPFL est d’enseigner, sa 2ème mission est la recherche. Sa 3ème mission peut-être moins connue, est l’innovation et le transfert de technologie, qui comprend l’entrepreneuriat. Si vous avez des idées créatives, nous sommes ici pour vous aider. Plus sur http://vpiv.epfl.ch/innogrant

Pour vous montrer que ceci a été entendu au sommet des meilleures universités, tant le président de l’Université de Stanford que le président de l’EPFL ont été des entrepreneurs, ils ont été les fondateurs de 3 start-ups chacun. Je vais offrir une bouteille de champagne au premier étudiant qui m’envoie par email les noms de ces 6 entreprises. Je suis Lebret Hervé et je soutiens les entrepreneurs à l’EPFL.

La réponse se trouve ici, mais plus important encore, je vais revenir rapidement sur le discours de Risto Siilasmaa, le chairman de Nokia.

Le Cygne Noir, suite et fin?

Comme suite aux « posts » sur le Cygne Noir, le « Black Swan » de Nassim Nicholas Taleb, j’ai eu la chance d’expliquer comment je comprenais ce phénomène dans l’émission Babylone de la station Espace 2 sur la Radio Télévision Suisse Romande. Merci à Jean-Marc Falcombello pour ce long entretien. Cela dure 19 minutes entre les minutes 23:15 et 42:00.

je suis moins sûr que le lien suivant fonctionne: http://www.rts.ch/espace-2/programmes/babylone/4203353-moi-je-ne-bluffe-pas-l-insoutenable-legerete-de-l-incertitude-30-08-2012.html?f=player/popup

L’innovation en Suisse d’après Neil Rimer

«Il y a de l’innovation en Suisse, mais peu d’entrepreneurs prêts à conquérir le monde» Voici ce que déclare Neil Rimer aujourd’hui au Journal Le Temps. L’article est parfois payant, cliquer ici.


Neil Rimer, associé et fondateur d’Index Ventures. (Véronique Botteron)

Et d’ajouter: « Pour attirer […], il faut une masse critique de start-up afin qu’il y ait d’autres options envisageables en cas d’échec. […] La Suisse et ses cantons cherchent à attirer des entreprises traditionnelles ou les centres administratifs de grandes sociétés. […] Mon grand souhait serait que les autorités encouragent la création de postes d’ingénieurs, de designers, de marqueteurs et de managers. C’est ainsi que nous attirerons une masse critique de professionnels capables de créer et de faire grandir les start-up en Suisse. »

Le constat ne se limite pas à la Suisse, l’Europe souffre d’un certain soutien à ce qui est établi. Mais il faut croire que le problème est de mieux en mieux compris. Les nouveaux entrepreneurs et investisseurs semblent d’accord et les politiques les écoutent…